Brexit, en avant toute ! Le Premier ministre conservateur Boris Johnson s'impose vendredi comme l'homme fort du Royaume-Uni après son triomphe aux législatives qui lui permet d'honorer sa promesse de sortir son pays de l'Union européenne le 31 janvier, après plus de trois ans de déchirements.
Les résultats publiés jusqu'à vendredi matin ont confirmé la tendance donnée par les premières estimations: une majorité écrasante pour les conservateurs, qui n'avaient plus exercé un tel contrôle sur le Parlement britannique depuis Margaret Thatcher.
En raflant des circonscriptions ouvrières détenues depuis des décennies par les travaillistes, les tories ont les coudées franches pour mettre en oeuvre le Brexit, approuvé à 52% par les Britanniques en 2016 mais dans l'impasse.
Après dépouillement dans 647 circonscriptions sur 650, le parti de Boris Johnson avait raflé 362 sièges à la Chambre des communes contre 317 remportés en 2017. Principale formation d'opposition, les travaillistes s'effondrent à 203 sièges (contre 262), plaçant leur très à gauche chef de file Jeremy Corbyn sur un siège éjectable.
Ce "nouveau mandat fort (...) donne à ce nouveau gouvernement l'occasion de respecter la volonté démocratique du peuple britannique", a souligné Boris Johnson. Il a évoqué un "tremblement de terre" qui redessine le paysage politique britannique, au profit des conservateurs.
Le slogan «Get Brexit done» a fait mouche
Le slogan «Réalisons le Brexit!», que le bouillonnant dirigeant à la tignasse blonde a répété à l'envi durant sa campagne, a fait mouche auprès des électeurs lassés de plus de trois ans de psychodrame.
Désormais doté d'une confortable majorité absolue qui lui manquait jusqu'à présent, il ira tout droit à Buckingham Palace pour être renommé Premier ministre par la reine Elizabeth II.
Boris Johnson a été félicité par son fidèle soutien, le président américain Donald Trump, qui lui a promis sur Twitter «un énorme nouvel accord commercial après le BREXIT», "potentiellement beaucoup plus gros et plus lucratif que n'importe quel accord qui pourrait être conclu avec l'Union européenne".
A Bruxelles, où les dirigeants européens sont réunis en sommet, la France a salué une "clarification".
Pour le travailliste Jeremy Corbyn, 70 ans, c'est l'humiliation. "Très déçu", ce dernier a annoncé qu'il ne conduirait pas le parti aux prochaines élections, tout en souhaitant voir son parti entamer une "réflexion sur le résultat du scrutin et sur sa future politique". Maigre consolation, il a été élu pour la dixième fois, dans la circonscription londonienne d'Islington nord.
Chef de l'opposition le plus impopulaire jamais enregistré dans les sondages, Jeremy Corbyn a payé sa position ambiguë sur la sortie de l'UE. Il voulait renégocier un nouvel accord de divorce, plus social, puis le soumettre aux Britanniques avec comme alternative le maintien dans l'UE, sans lui-même prendre position.
Les travaillistes ont perdu des fiefs symboliques, comme la ville de Workington. Un groupe de réflexion avait identifié «l'homme de Workington», un homme blanc, âgé, sans diplôme, pro-Brexit comme l'électeur clé pour remporter le scrutin.
«Les conservateurs représentent désormais de nombreux ménages à faible revenu, des personnes qui travaillent dans les industries manufacturières et traditionnelles du centre et du nord de l'Angleterre», a dit à l'AFP le professeur Tony Travers, de la London School of Economics (LSE).
Jusqu'à présent, Boris Johnson n'avait pas réussi à faire adopter par le Parlement l'accord de divorce qu'il avait négocié avec Bruxelles, faute de majorité à la Chambre des communes.
Il a promis de soumettre cet accord aux députés avant Noël avec l'objectif de mettre le Brexit en oeuvre fin janvier, après trois reports.
Boris Johnson a bénéficié d'un coup de pouce du Parti du Brexit, emmené par l'europhobe Nigel Farage, qui devrait faire chou blanc après s'être retiré de nombreuses circonscriptions pour ne pas diviser le vote pro-Brexit.
L'espoir d'empêcher le Brexit s'est évanoui
Réaliser le Brexit doit permettre de tourner la page et de s'atteler aux "priorités" des Britanniques, comme la santé, la sécurité et les infrastructures, a affirmé le chef de gouvernement.
Mais Boris Johnson devra aussi préciser quel type de relation il veut nouer avec l'Union européenne. Dès le Royaume-Uni sorti de l'UE s'ouvriront de difficiles négociations sur ce sujet, censées être conclues d'ici à la fin 2020. Mission impossible vu la complexité du sujet, estiment bien des analystes.
Les nouveaux députés siégeront dès mardi et Boris Johnson leur déclinera son programme législatif par le biais du traditionnel discours de la reine jeudi.
Pour les pro-UE, l'espoir d'empêcher le Brexit s'est évanoui avec la défaite du Labour et l'échec des libéraux-démocrates, opposés au Brexit, dont la cheffe Jo Swinson n'a pas été réélue.
Seuls les nationalistes écossais du SNP tirent leur épingle du jeu, progressant nettement à 48 sièges, selon les résultats partiels.