Commerces fermés, places et rues désertes: Madrid est devenue samedi, comme d'autres villes européennes, une cité fantôme pour tenter de limiter la propagation à vitesse grand V du nouveau coronavirus.
A côté de la célèbre place de la Puerta del sol, Paco Higueras, masque sur la bouche et ganté, n'en revient pas. «C'est désolant alors que nous sommes si habitués à y voir la foule», dit cet employé d'une chaîne de restauration.
La région de Madrid, la plus touchée du pays par la pandémie, a décrété la fermeture de tous les commerces sauf ceux de première nécessité. L'Espagne est le deuxième pays le plus affecté en Europe après l'Italie et compte plus de 5.700 cas selon le dernier bilan publié samedi à la mi-journée.
Dans le centre de la capitale espagnole, grouillant habituellement d'activité et connu pour ses innombrables bars, l'impact est impressionnant.
Sur la Plaza Mayor et les rues adjacentes, prisés des touristes, toutes les terrasses sont fermées. Hormis les véhicules de police et quelques employés municipaux nettoyant la chaussée, seuls quelques touristes déambulent.
Sur les devantures des cafés et restaurants, les affiches annoncent «fermé par responsabilité sociale».
Dans les pharmacies, épargnées comme les supermarchés par la fermeture, les clients font la queue en gardant leurs distances les uns avec les autres et les employés proposent du gel pour se désinfecter les mains après avoir payé.
L'activité du restaurant dans lequel travaille Paco Higueras a chuté de 80% cette semaine avant de devoir baisser le rideau mais il accepte, résigné, de «devoir faire face à ce qui arrive».
Elena García Mañes a elle bravé la peur de sortir pour aller donner du sang alors que l'épidémie a fait baisser les stocks, amenant les autorités à lancer un appel aux dons.
«Nous sommes quatre colocataires et quand nous avons vu l'appel, nous nous sommes organisées pour venir» donner, dit cette employée d'une agence de communication de 25 ans sur la Puerta del Sol, devant un bus de la Croix Rouge dont l'un des volontaires, Khuni Hiko Shimizu, s'attendait à «voir beaucoup moins de gens».
Les supermarchés toujours assaillis
Dans ce décor de ville fantôme, seuls les supermarchés continuent de voir défiler les Madrilènes avides de faire des réserves même si les distributeurs ont assuré qu'il n'y aurait pas de problème d'approvisionnement. Les rayons de conserves, pâtes, papier hygiénique sont parfois vides.
Les touristes se sentent eux pris au piège dans une ville dont les musées comme le Prado ou la Reina Sofia, ont également fermé.
«Nous ne nous attendions pas à ce que tout ferme du jour au lendemain», déplore Xenia Damianaki, une touriste grecque arrivée jeudi avec son mari et sa fille. Elle craint désormais qu'ils "ferment la frontière" et va tenter de repartir dimanche.
Ces scènes vues à Madrid rappellent celles qu'ont connues ces derniers jours d'autres villes européennes, en particulier en Italie qui a confiné cette semaine ses 60 millions d'habitants.
A Milan, le silence est de plomb et seuls passent des policiers en patrouille, vérifiant que les habitants de la capitale économique italienne respectent bien l'obligation de limiter au minimum les déplacements, seulement pour motifs professionnels ou impérieux.
A Dublin, capitale de l'Irlande qui ne compte pourtant que peu de cas par rapport à l'Espagne ou l'Italie, les habitants ont pris le risque particulièrement au sérieux et ont déserté depuis vendredi rues et bureaux pour tenter de juguler la propagation du virus. Les bus et les tramways y sont vides et les rares passants portent des masques.
AFP