Ce n’est pas un poisson d’avril : Trump et Bolsonaro admettent, enfin, l’extrême gravité du coronavirus

Contredisant leurs déclarations passées sur le Covid-19, Donald Trump et Jair Bolsonaro ont admis ce mardi la gravité de la pandémie sur leurs pays respectifs. Le président américain a été particulièrement macabre : «l'Amérique s'apprête, dans les semaines à venir, à battre chaque jour les records macabres de la veille.. C'est (un virus) vicieux». Quand au brésilien, qui qualifiait jusque-là le coronavirus de «petite grippe», a déclaré de son côté qu'il constituait «le plus grand défi» posé à sa génération. Deux déclarations synchronisées des deux derniers chefs d'états coronaviruso-sceptique.

La mine était sombre. Le ton aussi. Courbes effrayantes à l'appui, Donald Trump a opté mardi - au moins temporairement - pour un autre registre face au coronavirus.

Entouré de «Tony» et «Deborah» (Anthony Fauci et Deborah Birx), les deux figures scientifiques de la cellule de crise Covid-19 sur lesquels il ne tarit pas d'éloges, il s'est posé en dirigeant rassembleur face à une tragédie nationale.

«Notre pays est confronté à une épreuve sans équivalent dans son histoire», a-t-il lancé, appelant tous les Américains à «faire des sacrifices» et évoquant une période «très douloureuse» à venir.

Une question a immédiatement surgi dans tous les esprits: le milliardaire républicain, qui peine à s'en tenir à un seul message, reviendra-t-il rapidement à ses propos de campagne ou ses piques contre tel ou tel gouverneur qui aurait oublié de le complimenter haut et fort?

Les jours et les semaines à venir le diront. Mais le changement de tonalité était spectaculaire.

«C'est une grippe saisonnière, c'est comme une grippe saisonnière», déclarait-il le 27 février depuis la salle de presse. «Ce n'est pas une grippe saisonnière», a-t-il lancé mardi depuis le même pupitre. «C'est (un virus) vicieux».

Trump dresse un tableau apocalyptique

Donald Trump a dressé le tableau apocalyptique de la menace sanitaire pesant sur les Etats-Unis. Et insisté sur ce à quoi l'Amérique aurait assisté sans mesures de distanciation sociale.

«Vous auriez vu des gens mourir dans les avions. Vous auriez vu des gens mourir dans les halls d'hôtel. Vous auriez vu la mort partout».

La Maison Blanche estime que la maladie pourrait faire entre 100.000 et 240.000 morts si les restrictions actuelles sont respectées, contre 1,5 à 2,2 millions sans aucune mesure.

«Plus d'Américains ont perdu la vie à cause du Covid-19 qu'en Afghanistan ou lors des attentats du 11-Septembre», rappelait Richard Haass, président du Council on Foreign Relations.

«D'ici quelques jours, ce sera plus qu'en Irak. D'ici quelques semaines, ce sera plus que les trois ensemble».

Dans une autre mise en perspective historique sidérante, le New York Times soulignait que Donald Trump s'apprêtait, si les projections de confirment, à voir dans les mois qui viennent plus d'Américains mourir du Covid-19 que Harry Truman, Dwight Eisenhower, John F. Kennedy, Lyndon Johnson et Richard Nixon n'en ont vu mourir pendant les guerres de Corée et du Vietnam.

Au Brésil, le président admet que le coronavirus «est le plus grand défi» au pays

Le président brésilien Jair Bolsonaro a admis mardi que l'épidémie de Covid-19, qu'il qualifiait jusque-là de «petite grippe», constitue «le plus grand défi» posé à sa génération, tout en maintenant que la lutte contre la pandémie ne devait pas nuire à l'économie.

«Le Brésil a beaucoup progressé ces quinze derniers mois (depuis son arrivée au pouvoir, ndlr) mais à présent nous sommes face au plus grand défi de notre génération», a reconnu le président d'extrême droite, lors d'une allocution solennelle.

Jair Bolsonaro n'a cessé de minimiser l'ampleur de l'épidémie due au coronavirus et a fustigé les mesures de confinement prises dans le monde et par la majorité des Etats brésiliens, leur opposant la nécessité de préserver l'économie et l'emploi.

«Nous avons une mission, sauver des vies sans oublier les emplois», a-t-il déclaré lors de son discours, dans la nuit de mardi à mercredi.

«D'une part, nous devons être prudents, prendre des précautions avec tout le monde, principalement avec les plus âgés et ceux qui souffrent de maladies sous-jacentes. D'autre part, nous devons lutter contre le chômage qui croît rapidement, particulièrement chez les plus pauvres», a argué le président.

«L'effet collatéral des mesures prises pour combattre le coronavirus ne peut pas être pire que la maladie elle-même», a-t-il justifié.

Des concerts de casseroles ont accueilli son bref discours dans les grandes villes du pays.

Ses prises de position hostiles au confinement de la population vont à l'encontre des recommandations de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) et des experts, y compris son ministre de la Santé Luiz Henrique Mandetta, un médecin.

Le président brésilien a également suscité une polémique mardi, en mettant en avant un extrait d'un discours du directeur général de l'Organisation mondiale de la Santé Tedros Adhanom Ghebreyesus, insinuant que celui-ci était favorable à l'arrêt des mesures de distanciation sociale.

Ce que le directeur de l'institution a démenti sur Twitter, sans mentionner le président brésilien.

«Je n'utilise pas ces mots pour nier l'importance des mesures de prévention contre la pandémie», a assuré Bolsonaro dans son allocution.

Quelque 201 personnes ont succombé au virus au Brésil, pays de 210 millions d'habitants, où les autorités ont prévenu que le pic de l'épidémie ne serait pas atteint avant fin avril.

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