Au lendemain des indépendances, le défunt Roi Sa Majesté Mohammed V réunissait au siège de la Préfecture de Casablanca, en janvier 1961, une conférence africaine dans le but d’examiner la situation politique, économique et sociale en Afrique et d’adopter la charte dite de Casablanca, charte de l’Afrique nouvelle traçant le cadre de l’action à engager pour la réalisation des principaux objectifs africains.
La charte de Casablanca, adoptée à quelques semaines de la mort du Père de la Nation (qui s’est éteint le 26 février 1961), fut réellement une véritable contribution à la construction de l’unité africaine, car elle est demeurée ouverte à tous les pays africains et a constitué un élément fondamental dans l’édifice continental. Etaient présents et témoins de cette grande fête continentale, des géants de l’histoire de l’Afrique, tels Jamal Abdel Nasser d’Egypte, Kwamé N’Krumah du Ghana, Modibo Keita du Mali et Ahmed Sékou Touré de Guinée, entre autres chefs d’Etat africains.
La Charte de Casablanca et unité africaine
Dans son discours d’ouverture de cette Conférence, Sa Majesté Mohammed V expliquait clairement que le sommet «n’est dirigé contre aucun État, aucun continent, de même qu’il exclut tout sentiment d’hostilité ou idée de discrimination», surtout qu’au lendemain de l’accession à l’indépendance, de lourdes responsabilités incombaient à ces jeunes pays, et toutes les énergies devaient être mobilisées pour la reconversion des régimes coloniaux, la libération des économies étroitement dépendantes de l’étranger, l’édification de systèmes nationaux orientés vers l’amélioration constante des conditions de vie des populations. Sur ce volet précis, Haj Ahmed Balafrej, alors ministre des Affaires étrangères, avouait qu’il «s’avérait nécessaire de faire appel à la coopération et à l’appui étrangers pour lutter plus efficacement contre l’ignorance et la misère, mais il fallait aussi et surtout empêcher le colonialisme de se maintenir ou de revenir sous des formes nouvelles.»
Hassan II, cheville ouvrière de la Conférence de Casablanca
A son intronisation, Sa Majesté Hassan II, est demeuré fidèle à l’esprit et à la lettre de la Charte de Casablanca (dont il a été la véritable cheville ouvrière alors qu’il était Prince héritier) : la trame de la Charte était la liquidation du régime colonial, l’élimination de la ségrégation raciale, l’évacuation des forces étrangères de l’Afrique, l’opposition à toutes les ingérences étrangères, et la consolidation de la paix et de la sécurité en Afrique et dans le monde. D’ailleurs, feu le Roi Hassan II, en s’adressant à la conférence africaine de Lagos en février 1962, en a rappelé les principales lignes en insistant sur le fait que «la charte de Casablanca à laquelle nous demeurons fidèles et loyaux nous fait obligation de ne ménager aucun effort et de ne reculer devant aucun sacrifice pour la réalisation de ses idéaux et le triomphe de la liberté, du progrès et de la justice sociale, aussi bien à l’intérieur de nos frontières que dans l’ensemble de l’Afrique.»
Entre-temps, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts, et le Maroc qui est un des fondateurs de l’ensemble panafricain, a dû quitter sa famille à cause d’une des plus grandes injustices du XXe siècle, remettant en question notre intégrité géographique et notre souveraineté sur une partie chère de notre territoire.
Retour à la famille institutionnelle
A l’avènement de Sa Majesté Mohammed VI, le souverain a fait de l’Afrique une priorité de la politique étrangère du Maroc, plaçant le continent au centre des préoccupations de Sa Majesté. Et au-delà des problématiques de sécurité, le Roi Mohammed VI s’est fixé trois priorités pour le continent : 1) la coopération sud-sud ; 2) le développement humain ; 3) l’intégration régionale. Et les road show de Sa Majesté dans plusieurs pays de l’Afrique septentrionale, australe, occidentale et orientale sont, sans ambiguïté, l’illustration claire et nette de l’enracinement profond du Maroc dans son ensemble régional et continental, et également la preuve que le Maroc partage avec son environnement africain les mêmes soucis et tente de relever les mêmes défis au profit d’une Afrique prospère et pacifiée ; et le retour tant attendu du Royaume du Maroc au sein de sa famille panafricaine n’est, dans ce cas d’espèce, qu’un ajustement historique.
Abdellah El Hattach. Follow @aelhattach