Une rencontre secrète a eu lieu à Abou Dhabi, jeudi dernier, entre le ministre des Affaires étrangères des Émirats arabes unis, Abdallah ben Zayed, le ministre israélien Ron Dermer et le conseiller principal du président Biden pour le Moyen-Orient, Brett McGurk, pour discuter d'un plan pour la gestion de Gaza après la guerre.
De hauts responsables israéliens ont révélé ce mardi 23 juillet 2024 que le ministre des Affaires étrangères des Émirats, Abdallah ben Zayed (ABZ), a réuni à Abou Dhabi, le conseiller principal du président Biden pour le Moyen-Orient, Brett McGurk et le ministre des Affaires stratégiques Ron Dermer, confident proche de Netanyahu. Le chef de la division politico-sécuritaire au ministère de la Défense israélien, Dror Shalom, qui a travaillé sur les propositions israéliennes pour les plans pour le jour après la guerre à Gaza, a également été du voyage. Cette rencontre qui s'est déroulée dans le plus grand secret a été précédée par une autre rencontre discrète entre ABZ et Dermer durant le mois de juin, rapporte «Israel Hayom».
Propositions et conditions émiraties
Un jour avant l'arrivée des Israéliens à Abou Dhabi, les Émirats ont publié leurs propositions pour l'après-guerre dans un article de Lana Nusseibeh, envoyée spéciale d'ABZ, dans le Financial Times. Elle a suggéré le déploiement d'une force internationale temporaire à Gaza pour répondre à la crise humanitaire, rétablir l'ordre et jeter les bases d'une gouvernance stable. Les Émirats ont exprimé leur volonté de participer à cette force internationale et d'envoyer des troupes à Gaza, à condition que celle-ci soit invitée officiellement par l'Autorité palestinienne.
Toutefois Abou Dhabi a posé plusieurs conditions à sa participation dans une force internationale :
- La force internationale devrait entrer à Gaza sur invitation officielle de l'Autorité palestinienne.
- L'Autorité palestinienne devra entreprendre des réformes significatives et nommer un nouveau Premier ministre doté de pouvoir et d'indépendance.
- Le gouvernement israélien devra permettre à l'Autorité palestinienne de jouer un rôle dans la gouvernance de Gaza et accepter un processus politique basé sur la solution à deux États.
- Les États-Unis auront un rôle de premier plan dans toute initiative pour le «jour après» la guerre.
Quand Abdallah ben Zayed a qualifié l'Autorité Palestinienne de « Ali Baba et les 40 voleurs»
Les Émirats arabes unis veulent être partie prenante d'une solution à Gaza qui n'inclura pas le Hamas, mais ils sont également très réservés sur la direction actuelle de l'Autorité palestinienne, écrit Ravid Barak sur Walla. Lors d'une réunion en juin entre plusieurs ministres arabes et le secrétaire d'État Anthony Blinken, l'ABZ a qualifié la direction palestinienne de "Ali Baba et les 40 voleurs". Les Émirats arabes unis ont fait savoir à l'administration Biden que le nouveau Premier ministre palestinien, Mohammad Mustafa, est l'un des proches d'Abbas et qu'il ne serait donc pas indépendant et ne mettrait pas en œuvre les réformes nécessaires. Au lieu de cela, les Émirats ont poussé à nommer d'autres candidats, y compris l'ancien Premier ministre palestinien Salam Fayyad, un opposant à Abbas.
Le double jeu de Netanyahu
Netanyahu a déclaré qu'il voulait que les Émirats arabes unis fassent partie du plan pour le jour après la guerre à Gaza. Le Premier ministre souhaiterait que les Émirats arabes unis envoient des soldats, paient pour la reconstruction de Gaza et modifient le système éducatif dans la bande pour "déradicaliser" la population.
Le premier ministre israélien est toujours opposé à la fin de la guerre et refuse tout rôle officiel de l'Autorité Palestinienne à Gaza ou tout processus politique basé sur la solution à deux États. Il est à noter que le ministre de la Défense Yoav Gallant a présenté il y a plusieurs mois un plan pour le «jour après» à Gaza très similaire à la proposition des Émirats, mais Netanyahu l'a complètement rejeté.
Selon les sources de Walla, Netanyahu commence à montrer une certaine ouverture pour discuter de la proposition des Émirats et de Gallant en privé.
«Netanyahu a attaqué le plan de Gallant et l'a bloqué pendant des mois, mais maintenant il l'a pris, l'a traduit en anglais et l'a donné à Dermer pour le présenter aux Émirats arabes unis et aux Américains comme si c'était son invention», a déclaré un responsable israélien à Walla.
Pressions américaines
L'administration Biden pousse Netanyahu depuis des mois à discuter sérieusement d'un plan pour le jour après, surtout alors que les efforts se poursuivent pour tenter de parvenir à un accord de libération des otages et un cessez-le-feu. D'ailleurs, le président américain prévoit de discuter de cette nécessité avec Netanyahu lors de leur rencontre à la Maison-Blanche.
Le secrétaire d'État américain Tony Blinken a souligné, vendredi au forum de sécurité d'Aspen, qu'un vide de pouvoir à Gaza, après le conflit, ne doit pas être comblé par un retour du Hamas, une occupation israélienne ou un chaos généralisé.