Depuis hier, mercredi 6 février 2019, se tient à Washington la réunion de la coalition contre Daech au niveau des ministres des Affaires étrangères. Le Maroc y est représenté par son chef de la diplomatie, Nasser Bourita. L’objectif de cette réunion est de parler de la prochaine étape de la guerre contre ISIS. Dans un communiqué, le Département d’Etat américain a indiqué que cette réunion a engagé des «discussions approfondies sur l’imminente défaite territoriale de l’Organisation de l'Etat islamique en Irak et en Syrie, résultat de quatre années d'efforts de la Coalition et de ses partenaires».
Au cours de cette conférence, qui achèvera ses travaux aujourd’hui, les Etats-Unis, malgré leur retrait de la Syrie, promettent de continuer la lutte contre Daech. Lors de la cérémonie d’ouverture, Mike Pompeo a affirmé que Daech « reste une menace dangereuse » et « il revient à notre génération d’y mettre fin ». Composée de 74 pays et cinq organisations internationales, la coalition anti-Daech a reconnu que la nature du combat est « en train de changer ». Mike Pompeo a affirmé que le combat « ne sera pas forcément en premier lieu militaire », vu que « nous entrons dans une ère de jihad décentralisé et nous devons donc également être agiles dans notre approche », a plaidé Mike Pompeo. C’est dire l’importance de l’échange de renseignements entre les différents membres.
Les ministres présents ont également discuté de la prochaine étape de la campagne contre Daech en Irak et en Syrie afin d’éviter toute résurrection. La coalition a pour habitude de se réunir régulièrement pour coordonner ses actions. Le 26 juin 2018 s’est tenue, d’ailleurs, à Rabat, une rencontre régionale pour aborder la menace de Daech en Afrique.
La guerre portée sur d’autres fronts
Concernant les djihadistes expatriés, Mike Pompeo a appelé les pays d’origine à rapatrier leurs djihadistes et à « les poursuivre en justice et les punir ». Sur le plan financier, Mike Pompeo a appelé les autres membres de la coalition à mettre la main à la poche en invoquant un trou de 350 millions de dollars pour financer le Fonds de stabilisation pour l’Irak en 2019.
Si la décision du retrait américain de Syrie a surpris plusieurs pays, les Etats-Unis réaffirment que le combat continue « en ne laissant aucun répit à ceux qui voudraient nous détruire », a clamé Mike Pompeo. Au cours de cette réunion ministérielle, la situation des combattants kurdes, considérés comme « terroristes » par Ankara devrait être étudiée. L’éventualité de la création d’une zone de sécurité n’est pas exclue. En marge de cette réunion ministérielle, Nasser Bourita a eu des entretiens avec son homologue américain, Mike Pompeo, qui ont porté, notamment, sur les relations bilatérales.
Les enseignements tirés par la diplomatie marocaine
Lors des travaux de la réunion ministérielle de la coalition mondiale anti-Daech, Nasser Bourita , dans une intervention le 6 février, a mis en évidence trois points. Malgré la série de défaites en Irak et en Syrie, la menace de Daech et de ses ramifications demeure en raison de la résilience de ses combattants (20 000), le développement d’une marque Daech avec 25 groupes affiliés dans plus de 25 pays, notamment en Afrique du Nord et en Afrique sub-saharienne, les capacités renforcées des affiliés et la capacité permanente de Daech de diriger des attaques dans le monde entier. En 2017, cette organisation terroriste a attaqué 286 villes. Dans ce sillage, le chef de la diplomatie marocaine a appelé les autres membres de la coalition à ne pas « laisser aux militants et aux sympathisants de Daech le temps, l’espace et les ressources nécessaires pour maintenir leur idéologie odieuse et éventuellement planifier la résurgence du soi-disant «califat» ».
Aider l’Afrique à gérer ses défis sécuritaires
Second point extrêmement important, l’expansion alarmante de Daech en Afrique. Lors de la réunion de juin 2018, les pays africains avaient demandé à la coalition son aide pour « l’élaboration et la mise en œuvre de stratégies coordonnées, concrètes et efficaces pour contrer cette menace ». Dans ce sens, le Maroc a appelé à les soutenir dans la mise au point de « solutions durables aux causes profondes du terrorisme et de l’extrémisme violent ».
Dans ce dessein, le Royaume a appelé au règlement des conflits et à la stabilité, au renforcement des structures de l’Etat et de leurs capacités et de s’attaquer aux vulnérabilités en développant un modèle socio-économique durable et inclusif.
Nasser Bourita, dans un troisième point, est revenu sur l’approche marocaine de prévention et de lutte contre la radicalisation qui a montré son efficacité et sa pertinence. « En sa qualité de coprésident du Forum mondial de lutte contre le terrorisme (GCTF), le Maroc s'est engagé à continuer à promouvoir l'importance de développer et de renforcer les capacités civiles des pays en matière de développement de la résilience nécessaire pour éviter la résurgence de Daech ou de toute autres groupes partageant les mêmes objectifs extrémistes violents, où qu'ils se manifestent », a soutenu Nasser Bourita devant ses homologues. La grande priorité du Maroc est de coordonner avec d’autres plateformes multilatérales pour implémenter les bonnes pratiques du GCTF afin de contrer les menaces terroristes.
Présent sur plusieurs fronts, le Maroc est donné en exemple en matière de lutte antiterroriste. Son expertise, une fois exportée en Afrique, devrait permettre à plusieurs pays de mieux gérer ce genre de menaces.