Gérard Araud : « Tout mandat présidentiel français commence à Alger et finit à Rabat » 

Confronté au même dilemme aigu que ses prédécesseurs dans la danse périlleuse de l'équilibre des intérêts français entre le Maroc et l'Algérie, Emmanuel Macron a fini par sceller son choix en embrassant les revendications de souveraineté du Maroc sur le Sahara, au prix de compromettre l'un des projets phares de ses mandats présidentiels : la réconciliation historique avec l'Algérie.

Gérard Araud, ancien représentant permanent de la France aux Nations Unies, résume cette dynamique géopolitique inévitable pour chaque président français en une phrase percutante : « Tout mandat présidentiel français commence à Alger et finit à Rabat. »

Alors que les présidents français se succèdent, l'ombre d'Alger et le soleil de Rabat semblent toujours présents, marquant les mandats de leur empreinte indélébile. Dans ce jeu de lumières et d’ombres, la victoire revient finalement à celle qui éclaire et éclaire encore.

Il n’y a pas un diplomate, pas un député, pas un homme d’affaires français qui ne se soit offusqué du froid glacial qui a enveloppé, durant de longs mois, les relations entre Paris et Rabat. Peu à peu, l’exaspération des cercles diplomatiques, économiques, et partisans s’est muée en un grondement sourd, jusqu’à atteindre un paroxysme où les murmures des sages du Quai d'Orsay ont trouvé écho dans la presse, notamment les colonnes du quotidien proche du pouvoir, Le Monde.

L’édition du 6 janvier 2023 révélait ainsi un aveu poignant et une recommandation à peine voilée au locataire de l'Élysée : « La tradition voulait que la France fût plutôt pro-marocaine, que le lien avec l’Algérie fût irrémédiablement tourmenté, bien que préservé, et chacun s’accommodait de cet héritage de l’histoire. Au Quai d’Orsay, un dicton résumait le tropisme de Paris : " Un président français commence par l’Algérie et finit par le Maroc ". L’évolution du contexte stratégique régional ainsi que certaines inflexions de la diplomatie française ont cependant remodelé le paysage. Un nouvel équilibre doit être trouvé. Et l’exercice est périlleux. »

Gérard Araud, diplomate chevronné ayant représenté la France aux Nations Unies, aux États-Unis et en Israël, a réagi à l’annonce officielle du président Macron d’aligner la France sur la position américaine et espagnole concernant la souveraineté du Maroc sur le Sahara. Sur son compte X, il a rappelé ce même adage suscité, qui semble gravé dans le marbre de l’exercice présidentiel en France vis-à-vis des pays du Maghreb : « Tout mandat présidentiel français commence à Alger et finit à Rabat » .

La publication de Gérard Araud dépasse la simple observation. Elle met en lumière un schéma récurrent : chaque président français, dès son entrée en fonction, tente de renouer avec l’Algérie. Cependant, ces efforts, selon le diplomate, se brisent invariablement contre une «hostilité» tenace de la part d'Alger, héritage encore vif de la guerre d’indépendance. Cet épisode historique, qui a marqué de manière indélébile les relations franco-algériennes, demeure brûlant en Algérie, alors qu’en France, il s’efface peu à peu de la mémoire collective, sauf dans certains cercles, notamment d’extrême droite.

L’analyse de Gérard Araud ne s’arrête pas là. Il décrit une transition inévitable, presque prédestinée, vers un rapprochement avec le Maroc. Ce basculement, que l’ancien diplomate associe à la reconnaissance par Paris de la souveraineté marocaine sur le Sahara, est perçu comme la fin d’un cycle diplomatique, un rituel qui se répète mandat après mandat. Cette reconnaissance, souvent interprétée comme un geste stratégique de la France, semble illustrer une relation plus fluide et pragmatique avec Rabat.

L'échange sur X se poursuit, où l’ancien ambassadeur dialogue avec plusieurs internautes, souvent algériens, qui explorent les racines profondes de cette «hostilité» algérienne, tout en questionnant l’absence d’une offre stratégique française envers Alger. Certains évoquent l’ombre persistante de l’OAS (Organisation de l’armée secrète) et les cicatrices laissées par la décolonisation. M. Araud, pour sa part, reste ferme : la France, dit-il, ne demande rien à l’Algérie. Selon lui, les clés de l’amélioration des relations sont entre les mains des dirigeants algériens.

Cet échange passionné illustre non seulement la complexité des relations diplomatiques entre ces trois nations du bassin méditerranéen, sans oublier l'Espagne, mais aussi la manière dont l’histoire coloniale continue de teinter les perceptions et d’influencer les interactions contemporaines.

Plus que jamais, l’ombre d’Alger et la lumière de Rabat se livrent non plus à un duel silencieux, mais à un affrontement bruyant, inscrivant dans chaque mandat présidentiel français les traces indélébiles de leur influence. Pourtant, au fil des décennies, dans ce ballet géopolitique où les ambitions se heurtent aux héritages du passé, c’est la lumière qui, peu à peu, triomphe de l’ombre.

Le Maroc, porté par une diplomatie habile et une souveraineté affirmée, éclaire de plus en plus l’horizon des décisions françaises, tandis que les nuages de l'hostilité algérienne, bien que toujours présents, finissent toujours par se dissiper. Et ainsi, au cœur des complexités arabes, méditerranéennes et africaines, c’est la clarté de Rabat qui finit par dominer, projetant ses rayons jusque dans les recoins les plus obscurs des relations franco-maghrébines. Dans ce jeu de lumières et d’ombres, la victoire revient finalement à celle qui éclaire et éclaire encore.

Intelligence analyst. Reputation and influence Strategist
20 années d’expérience professionnelle au Maroc / Spécialisé dans l’accompagnement des organisations dans la mise en place de stratégies de communication d’influence.

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