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Mourad Borja : Al Adl Wa Al Ihssan confond le mécanisme de la «Grâce royale » et l’«Amnistie générale »

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Alors que le Maroc célèbre le vingt-cinquième anniversaire de l’accession au trône du roi Mohammed VI, un événement a marqué les esprits et enflamme encore les discussions : la grâce royale accordée à une multitude de journalistes, blogueurs, militants civils et politiques, parmi lesquels des membres éminents de la Jamaa Al Adl Wal Ihsane, écrit Mourad Borja. Cet acte de clémence a suscité un large éventail de réactions, à la fois dans les cercles politiques et au sein de la société civile, donnant lieu à de nombreux communiqués, notamment celui de la Jamaa qui, tout en saluant cette décision, a appelé à une « réconciliation nationale » et à un « désengorgement des prisons », note l’inclassable journaliste.

Cependant, comme le souligne Mourad Borja, cette initiative royale, empreinte de bienveillance, semble avoir été mal interprétée par certains. La Jamaa, par exemple, a suggéré que la grâce aurait permis aux détenus de « retrouver leurs droits ». Pourtant, il convient de rappeler, comme l’explique Borja, que la grâce royale, tel que stipulé par l’article 58 de la Constitution, ne se confond pas avec une amnistie générale, mais relève d’une prérogative exclusive du roi, distincte de l’absolution complète qui relève, elle, de la compétence du Parlement.

Mourad Borja précise que la grâce royale se divise en deux types, collective et individuelle et relèvent de ce quia appelé communément « la grâce spéciale », qui constitue une prérogative royale souveraine. Cette grâce n’est pas liée aux jugements, ni aux procédures ni aux voies de recours, mais une suspension ou réduction de peine et non des annulations de condamnation. Elles ne lavent pas les condamnés de leurs infractions, mais se contentent d’atténuer les peines, en laissant intactes les sanctions civiles, contrairement à “l’amnistie générale”, qui relève de la compétence exclusive du Parlement.

En effet, l’amnistie générale, poursuit le fondateur de Aic Press, efface la peine ainsi que ses effets, conformément à l’article 51 du Code pénal, qui stipule que cette amnistie doit être promulguée par un texte législatif explicite. Les dispositions du nouveau texte constitutionnel de 2011 ont introduit des limitations à l’exercice de la grâce royale, notamment en ce qui concerne l’amnistie générale, qui était sous l’autorité du Souverain depuis l’indépendance politique du pays en 1956, jusqu’à l’entrée en vigueur de la nouvelle Constitution.

Une bouffée d’air frais

La grâce royale accordée à l’occasion du 25ème anniversaire de la fête du Trône, sans remettre en question les décisions de justice, incarne néanmoins une véritable bouffée d’air frais dans un contexte à la fois local et international marqué par des turbulences, observe avec perspicacité Mourad Borja. Sous le joug de politiques impopulaires et d’une crise socio-économique exacerbée, le Maroc a vu dans cette grâce un souffle d’espoir, un signal fort adressé aux Marocains, apportant un apaisement bienvenu dans un climat de tensions croissantes.

Le roi, par ce geste, a non seulement redonné la liberté à des citoyens qui étaient derrière les barreaux pour des raisons diverses, mais a aussi insufflé un sentiment de paix et de réconciliation, sublimant les festivités du Jubilé d’Argent. Mourad Borja met en lumière que les bénéficiaires de cette grâce incluent des figures médiatiques comme Taoufik Bouachrine, Omar Radi, Soulaiman Raissouni, ainsi que des blogueurs et militants civils, mais aussi des condamnés pour terrorisme dans le cadre du programme de réconciliation « Moussalaha ».

Néanmoins, la question de l’avenir des autres détenus politiques, et particulièrement celle des leaders du Hirak du Rif, reste en suspens, selon Borja. Le sort de figures emblématiques comme Nasser Zefzafi et ses compagnons, tout comme celui de l’ancien bâtonnier Mohamed Ziane, est au centre des préoccupations. Nombreux sont ceux qui, comme l’écrit Mourad Borja, espèrent un geste similaire pour ces détenus, qui symboliserait une réconciliation nationale véritable et achevée.

Mourad Borja rappelle que l’idée d’une amnistie pour les détenus du Rif avait d’ailleurs été proposée par la FGD (Fédération de la Gauche Démocratique) lors de la précédente législature, avant d’être relancée par le PSU (Parti Socialiste Unifié) dans le contexte actuel. Mais cette proposition n’a pas encore trouvé d’écho favorable auprès des instances décisionnelles.

Il est donc légitime de se demander, comme le fait Mourad Borja, si, à l’approche de la prochaine fête nationale, le Maroc assistera à un nouveau geste royal qui élargirait encore le cercle des bénéficiaires de cette grâce. Le pays, en prenant la présidence du Conseil des Droits de l’Homme des Nations Unies en janvier 2024, pourrait voir dans un tel acte une manière de marquer son engagement en faveur des droits de l’homme et de la réconciliation nationale.

Dans ce contexte, l’espoir d’une amnistie générale pour les détenus du Rif, ainsi que pour d’autres prisonniers politiques, demeure, souligne Borja. Cela permettrait non seulement de tourner une page douloureuse de l’histoire contemporaine du Maroc, mais aussi de donner une nouvelle impulsion à l’élan réformateur que le roi Mohammed VI a su imprimer à son règne.

Ainsi, conclut Mourad Borja, alors que le pays célèbre deux décennies et demie de règne sous le signe de la modernisation et du développement, il semble crucial de ne pas oublier ceux qui, par leurs luttes, ont cherché à apporter leur pierre à l’édifice national. La grâce royale, dans ce contexte, pourrait bien être le prélude à une amnistie plus large, qui marquerait une véritable réconciliation entre l’État et ses citoyens, pour un avenir commun pacifié et prospère.

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