En quittant l’opérateur téléphonique Méditel après de «bons et loyaux services», Mohamed El Mandjra lance la société Blue Mango Capital dont l’ambition première était de construire et de gérer un réseau d’établissements de soins de santé au Maroc et en Afrique. La première acquisition de taille a concerné la clinique Al-Kindy, l’un des établissements casablancais les mieux cotés dans le traitement des cancers. Plus tard, Blue Mango Capital s’allie à l’émirati Abraaj en créant le réseau réseau Oncologie et Diagnostic du Maroc, ODM, mettant au passage dans son escarcelle plusieurs établissements spécialisés à Casablanca, Tanger, Marrakech et Oujda. Et avec le désengagement du groupe Saham du secteur de la santé, et l’arrivée dans son tour de table du britannique Alta Semper Capital, qui a repris les parts d’Abraaj, Mohamed El Mandjra semble disposer d'une autoroute pour renforcer son positionnement dans le secteur.
Afin de répondre aux exigences de son nouvel actionnaire britannique, rentabiliser dans les meilleurs délais ses investissements et faire fonctionner toute cette machine, le nouveau« roi de la chimiothérapie », a besoin de ressources humaines qualifiées, notamment des spécialistes en oncologie, en radiologie et des radiothérapeutes. Ces profils étant rares dans le privé, ODM est parti à leur chasse dans le public.
Ces pratiques, illégales, sont répandues dans le secteur privé et ne sont d’ailleurs pas l’apanage du réseau d’El Mandjra. Elles ont souvent été dénoncées par le contribuable qui se retrouve obligé par son médecin traitant exerçant à l’hôpital public de le suivre dans la clinique où ce dernier passe le plus clair de son temps en violation flagrante des lois marocaines.
La médecine au Maroc reste une médecine de proximité et de personnes. Un patient va chez le médecin X ou Y. Les patients sont prêts à suivre leur médecin dans n’importe quel établissement. Ce qui n’est pas le cas à l’étranger où le patient opte pour un établissement presque indépendamment de la personne du médecin.
Pire, et à Marrakech par exemple, les cliniques ne font pas que «débaucher» des malades de l’hôpital public (dans le jargon, on appelle l’opération un «recrutement ») mais vont jusqu’à se «servir» à l’hôpital militaire de la ville. Et toutes les spécialités y passent : traumatologie, cardiologie, neurologie, oncologie, radiothérapie etc.
Dans le réseau d’ODM d’El Mandjra, on ne «recrute» pas uniquement les malades mais aussi leur médecin traitant, un militaire ! En effet, un médecin militaire, de ses initiales I.L., officier supérieur, de rang de commandant, spécialiste en radiothérapie, exerce en toute impunité, et À PLEIN TEMPS, dans les établissements de l’ancien patron de Méditel, sans que cela suscite le moindre émoi de l’Ordre des médecins et des pouvoirs publics.
Une affaire similaire avait éclaté il y a quelques semaines, mettant en cause un traumatologue de l’hôpital militaire de Marrakech qui recrutait des malades de cet hôpital pour le compte de la clinique où il exerce illégalement. Ce cas avait fait la une de certains médias nationaux et avait même fait réagir un organisme national de défense des droits de l’homme qui a dénoncé de telles pratiques en s’en ouvrant à l’inspecteur général des Forces armées royales à travers une lettre écrite.
Oncologie et Diagnostic du Maroc - ODM
Créée en 2014, ODM est spécialisé en oncologie et imagerie médicale. À date d’aujourd’hui, le réseau d’ODM compte une dizaine d’établissements, dont des centres très connus de Casablanca tels que Al Kindy et Radiologie Anoual. En plus de ces deux, Oncologie et Diagnostic du Maroc gère aussi le centre d’anatomo-pathologie Moulay Driss et la clinique Menara à Marrakech. ODM a construit en 2018, sur 3000m2, le Centre oriental Al Kindy à Oujda. Un projet similaire est lancé également à Fès et devrait voir le jour en 2019. ODM garde d’ailleurs un œil sur le démantèlement de Meden Healthcare (pôle santé du groupe Saham) dont ODM a déjà acquis deux centres de radiologie, le Blue Park, à Casablanca, et le centre Bouregreg, à Rabat.