Le 27 mai 2025, à Damas, les autorités syriennes ont officiellement fermé le bureau du Polisario et acté, aux côtés d’une délégation marocaine, la réouverture prochaine de l’ambassade du Royaume du Maroc. Une double annonce au retentissement discret mais stratégique, qui scelle la rupture d’un axe idéologique forgé depuis les années 1980 entre le régime syrien, l’Algérie et le front séparatiste.
CE QU’IL FAUT RETENIR
- Fermeture du bureau du Polisario à Damas, constatée sur le terrain par une mission conjointe maroco-syrienne.
- Réaffirmation officielle par la Syrie du respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale du Maroc.
- Mise en œuvre d’une décision royale : réouverture de l’ambassade marocaine à Damas, fermée depuis 2012.
- Effacement symbolique de l’axe Alger-Damas-Tindouf, construit à l’époque de Hafez Al-Assad.

Mission diplomatique marocaine en Syrie
Conformément à la décision du Roi Mohammed VI, une mission technique du ministère des Affaires étrangères du Maroc s’est rendue le 27 mai 2025 à Damas afin de préparer la réouverture de l’ambassade du Royaume, fermée depuis 2012. Des échanges ont eu lieu avec de hauts responsables syriens portant sur les modalités logistiques, juridiques et diplomatiques de cette reprise officielle.
Cette action s’inscrit dans le prolongement du message royal adressé au 34e Sommet Arabe, tenu à Bagdad le 17 mai 2025, où le Souverain avait annoncé cette décision dans une volonté de raviver les relations historiques entre les deux pays frères.
Fermeture du bureau du «Polisario» à Damas
Dans le cadre de cette même visite, une mission conjointe maroco-syrienne s’est rendue sur le terrain pour constater la fermeture effective des locaux occupés par les séparatistes du “Polisario”.
Les autorités syriennes ont réaffirmé à cette occasion :
- Leur respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale du Royaume du Maroc,
- Leur refus catégorique de tout soutien aux entités séparatistes,
- Leur volonté de renforcer la coopération bilatérale et de promouvoir la stabilité régionale.
Ce geste a été qualifié par les parties comme le début d’une nouvelle ère dans les relations maroco-syriennes.
Décryptage stratégique
1. La Syrie recompose ses alliances
Longtemps bastion du soutien anti-marocain dans le monde arabe, la Syrie de Bachar Al-Assad – aujourd’hui affaiblie, réintégrée dans la Ligue arabe mais encore largement marginalisée – opère un réalignement pragmatique. En rompant ouvertement avec le Polisario, le régime syrien envoie un message clair : il veut tourner la page des alliances idéologiques figées et cherche à capitaliser sur un rapprochement utile avec des États arabes stables et influents, à commencer par le Maroc.
2. L’Algérie et le Polisario, isolés sur le front syrien
L’Algérie avait, depuis les années 2010, multiplié les canaux officieux avec le régime syrien, notamment via le renseignement et des médiateurs tribaux, pour assurer au Polisario une présence à Damas. Des informations concordantes, issues de rapports de terrain et de révélations de services européens, indiquent que des éléments sahraouis auraient été formés militairement en territoire syrien ou via des proxies iraniens. Leur présence dans les zones de conflit (Alep, Deir ez-Zor) aurait été documentée, notamment par l’opposition syrienne.
La fermeture du bureau du Polisario à Damas acte l’effondrement opérationnel de cette coopération. Elle affaiblit l’axe Alger-Téhéran-Damas-Tindouf, qui faisait du front sahraoui un outil d’influence régionale.
3. Une diplomatie royale qui façonne le réel
En annonçant personnellement cette décision au 34e Sommet arabe à Bagdad, le Roi Mohammed VI n’a pas seulement marqué un tournant dans les relations maroco-syriennes. Il a démontré que la reconquête diplomatique du narratif saharien ne passe plus uniquement par les capitales occidentales, mais aussi – et surtout – par les bastions idéologiques du monde arabe.
Cette stratégie d’influence progressive, calibrée, patiente mais irréversible, fait du Maroc un acteur pivot dans la nouvelle architecture régionale post-2020.
Ce que cela implique
Axe | Tendance |
---|---|
Syrie | Repositionnement diplomatique. Moins d’alignement sur l’Iran et l’Algérie. Recherche de normalisation bilatérale avec les pays arabes modérés. |
Algérie | Revers diplomatique majeur. Isolement croissant du discours pro-Polisario, y compris chez les anciens alliés. |
Polisario | Perte d’un soutien historique. Réduction des marges de manœuvre sur le plan symbolique, logistique et stratégique. |
Maroc | Avantage diplomatique accru. Confirme sa capacité à reprendre pied dans des zones où il était marginalisé. |
Plus qu’un symbole, un basculement
La diplomatie marocaine vient de réussir un coup stratégique en silence : fermer une base arrière du Polisario dans une capitale hostile, tout en réactivant un canal diplomatique de premier plan. Le symbole est fort : le front séparatiste perd du terrain jusque dans ses bastions historiques.
Ce tournant pourrait annoncer d’autres recalibrages, à mesure que le Maroc poursuit sa politique de rapprochements ciblés en Afrique, au Moyen-Orient et en Asie. Chaque revers encaissé par le Polisario dans ces zones périphériques renforce, par contraste, la centralité de l’option marocaine du plan d’autonomie.