Sébastien Lecornu a été nommé mardi 9 septembre Premier ministre par Emmanuel Macron, en remplacement de François Bayrou, démissionnaire après son échec à obtenir la confiance des députés. À 39 ans, l’ancien ministre des Armées devient l’un des plus jeunes chefs de gouvernement de la Ve République, symbole de loyauté et désormais figure de proue d’un exécutif confronté à une double bataille : parlementaire et géopolitique.
La constance d’un fidèle récompensée
Lecornu incarne le profil rare de l’allié indéfectible. Depuis son entrée au gouvernement en 2017 comme secrétaire d’État à la Transition écologique, il a enchaîné les portefeuilles — Collectivités territoriales, Outre-Mer, puis Armées — sans jamais rompre avec la ligne présidentielle. À chaque remaniement, il a été maintenu, signe de la relation de fidélité réciproque qu’il entretient avec Emmanuel Macron. En 2024, il fut même l’un des rares à conserver son ministère lors du remaniement post-législatives anticipées, preuve supplémentaire de cette confiance.
Au-delà de cette fidélité, le choix de l’ancien ministre des Armées revêt une charge symbolique particulière. Emmanuel Macron n’a cessé ces derniers mois de prévenir les Français sur les risques de guerre et sur la fragilité d’un ordre international sous tension. Comme l’ont souvent relevé les observateurs, le chef de l’État gouverne avant tout par le biais des relations internationales, seule stratégie qui lui permette de préserver son autorité à la tête d’un pays difficile à réformer et miné par les blocages parlementaires. La nomination de Sébastien Lecornu, acteur central de la politique de défense, s’inscrit dans cette logique : faire de Matignon le poste avancé d’un exécutif tourné vers la gestion des crises et d’un « pays en guerre » théorisée à l’Élysée.
Un parcours forgé dans la droite républicaine
Militant UMP dès 16 ans, proche de Bruno Le Maire dont il fut l’assistant et compagnon politique, Lecornu a bâti sa carrière dans l’Eure, département qu’il a présidé. Il s’est aussi lié d’une amitié de vingt ans avec Gérald Darmanin, avec qui il partage une proximité personnelle et politique assumée. Ces fidélités croisées expliquent sa capacité à naviguer entre réseaux et sensibilités, tout en gardant son ancrage auprès du président.
Souvent surnommé « le Cornichon » par ses pairs du cercle d’Édouard Philippe, il cultive une image de sérieux et de ténacité, préférant revendiquer son expérience précoce plutôt que sa jeunesse. « Malheureusement, je suis né vieux », aime-t-il dire, rappelant que sa carrière a débuté à l’adolescence. Mais le défi qui l’attend est d’une autre nature : il devra désormais affronter un Parlement fragmenté, devenu un véritable champ de mines pour l’exécutif, là où François Bayrou a trébuché.
Vers un gouvernement de guerre ?
Mais Matignon n’est pas un ministère. Le terrain qui attend Lecornu est un Parlement fragmenté, devenu un véritable champ de mines politiques. Sa nomination, récompense d’une loyauté sans faille, est aussi un test grandeur nature : peut-il transformer la fidélité en autorité et incarner un Premier ministre de crise, à l’heure où certains s’interrogent si la France ne vit pas déjà sous les prémices d’un gouvernement de guerre ?