INSS : Israël pris dans la tenaille sino-américaine


Le chiffre clé : +20% d’importations depuis la Chine en 2024

Malgré une année marquée par la guerre de Gaza, les tensions politiques internes et les effets persistants du Covid-19, les échanges commerciaux entre Israël et la Chine ont connu une reprise notable en 2024, atteignant un total de 16,3 milliards de dollars (hors Hong Kong et diamants). Ce rebond est essentiellement porté par la forte hausse des importations, tandis que les exportations israéliennes vers la Chine poursuivent leur chute libre, atteignant leur plus bas niveau depuis une décennie.

Exports israéliens vers la Chine : une dégringolade silencieuse

À peine 2,76 milliards de dollars d’exportations en 2024, soit une baisse de 16,5 % par rapport à 2023. Le cœur de cette chute ? Le secteur des semi-conducteurs, autrefois fleuron de l’export technologique israélien vers la Chine. Les données douanières internationales montrent un effondrement quasi total des ventes de puces électroniques (HS 8542), passées de 1,9 milliard de dollars en 2020 à seulement 160 millions en 2024.

En toile de fond : la mise en œuvre progressive du CHIPS and Science Act américain, qui restreint l’exportation de technologies avancées vers la Chine. Une législation qui affecte directement des acteurs comme Intel-Israël et redessine les priorités commerciales du pays.

Des importations chinoises toujours plus centrales

Israël importe désormais plus de 13,5 milliards de dollars de produits chinois, soit 83 % de ses échanges bilatéraux avec Pékin. Cette dépendance touche plusieurs segments clés :

  1. Véhicules électriques (BYD domine le marché)
  2. Équipements électroniques
  3. Textiles et habillement

En valeur relative, Israël figure parmi les pays ayant connu la plus forte progression d’importations chinoises, aux côtés du Brésil, des Émirats arabes unis et du Vietnam.

Un déficit commercial qui bat des records

Le déséquilibre atteint des proportions inédites : 10,76 milliards de dollars de déficit, un record historique. Autrement dit, pour chaque dollar exporté vers la Chine, Israël en importe près de cinq.

Hong Kong, la porte dérobée ?

Tandis que les exportations vers la Chine continentale s’essoufflent, celles vers Hong Kong explosent : +31 % en 2024, à 1,43 milliard de dollars. L’ancienne colonie britannique jouerait-elle le rôle de hub de contournement pour les entreprises israéliennes, soucieuses de rester présentes sur le marché chinois malgré les obstacles réglementaires ?

Cette dynamique s’accompagne d’une envolée dans les secteurs optiques, électroniques, et plus récemment dans le transport aérien et maritime.

La Chine, coupable de dumping ?

Israël ne cache plus son inquiétude face à l’arrivée massive de produits chinois à bas coût, notamment dans le secteur de l’aluminium. En mai 2025, les autorités israéliennes ont imposé un droit de douane provisoire allant jusqu’à 146 % pour protéger l’industrie locale.

Les fabricants dénoncent une concurrence déloyale, soutenue par les surcapacités industrielles chinoises et des pratiques tarifaires agressives.

Sous pression américaine, Tel-Aviv s’ajuste

Le retour de Donald Trump à la Maison Blanche, début 2025, a relancé la guerre commerciale globale, centrée sur Pékin. Israël, allié stratégique des États-Unis, n’échappe pas aux contrecoups :

  • Imposition d’un tarif douanier de 17 % sur les produits israéliens exportés vers les États-Unis ;
  • Annulation sous pression américaine du contrat de fourniture de rames pour la ligne bleue du tramway de Jérusalem, remporté par le groupe chinois CRRC.
Entre alignement diplomatique et pragmatisme commercial

Israël se trouve pris entre deux logiques contradictoires :

  • L’impératif géostratégique de rester aligné sur Washington ;
  • Le besoin économique de préserver un accès compétitif aux marchés asiatiques, en particulier à la Chine, premier fournisseur d’Israël.

Le rapport de l’INSS conclut que le découplage complet est improbable, mais qu’un rééquilibrage ciblé et prudent des flux commerciaux est indispensable. En clair : la Chine doit rester un partenaire, mais plus sur les secteurs critiques.

Nawfal Laarabi
Nawfal Laarabi
Intelligence analyst. Reputation and influence Strategist 20 années d’expérience professionnelle au Maroc / Spécialisé dans l’accompagnement des organisations dans la mise en place de stratégies de communication d’influence.

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