La veillée religieuse en commémoration de l’Aïd Al-Mawlid Annabaoui Acharif, présidée par SM le Roi Mohammed VI, Amir Al-Mouminine, à la mosquée Hassan de Rabat, a offert une séquence qui ouvre le champ des interprétations. Alors que les caméras de la SNRT retransmettaient la cérémonie à la nation, elles ont saisi la présence de Cheikh Mouad Al Qadiri Boutchich, installé au troisième rang des mossamiiine ( les psalmodieurs ) qui récitaient les panégyriques à la gloire du Prophète Sidna Mohammed – Prière et Bénédiction sur Lui.
Cette veillée s’est déroulée en présence de SAR le Prince Héritier Moulay El Hassan, de SAR le Prince Moulay Rachid, de SA le Prince Moulay Ahmed, ainsi que des Conseillers du souverain dont M. Fouad Ali El Himma, aux côtés des membres du gouvernement, des présidents des deux Chambres du Parlement, de hauts gradés militaires et de personnalités religieuses et civiles.
Une absence remarquée : Madagh silencieuse
Cette apparition intervient dans un contexte inédit. Pour la première fois depuis des décennies, la prestigieuse tariqa Boutchichiya ne tient pas ses célébrations centrales du Mawlid à Madagh, son siège historique dans la région de Berkane. Dans un communiqué diffusé après le décès de Cheikh Jamal Eddine, le 8 août dernier, la zaouïa avait annoncé que les festivités seraient limitées à des commémorations régionales dans les différentes zaouïas du Royaume.
À cette suspension des rituels centraux s’ajoute l’annulation du Forum mondial du soufisme, autre rendez-vous majeur porté par Mounir Qadiri, frère de aîné de Mouad. Deux signaux qui traduisent l’onde de choc provoquée par la disparition du guide spirituel et le climat de recomposition qui agite la voie.

Le poids des signes dans une tariqa en transition
Dans le langage des soufis, l’essentiel ne se dit pas, il se montre. L’image de Mouad El Qadiri Boutchich au cœur d’une veillée royale, dans un moment de haute sacralité et sous le regard du Souverain, prend une valeur particulière. Au moment où la zaouïa traverse une crise de succession inédite, cette visibilité pourrait être interprétée comme une confirmation implicite de son rôle grandissant.
Le contraste est saisissant : Mounir Al Qadiri Boutchich, héritier testamentaire, voit ses initiatives publiques suspendues, tandis que Cheikh Mouad, apparaît dans l’orbite du cérémonial religieux officiel, sous le regard direct du Souverain et de son entourage le plus proche. Pour nombre d’observateurs, c’est une manière de signifier que l’équilibre penche désormais vers le cadet, plus enraciné dans le rite et perçu comme le dépositaire légitime du sirr de la voie.
Un moment charnière pour la Boutchichiya
La confrérie Boutchichiya, l’une des plus rayonnantes du Maroc et au-delà, vit un moment charnière. Privée pour la première fois de son Mawlid central, privée de son Forum international, elle se retrouve sans incarnation claire du dépôt spirituel transmis de génération en génération. Dans ce vide, chaque geste, chaque présence prend la valeur d’un signal.
L’apparition de Mouad Al Qadiri Boutchich à Rabat, dans la proximité symbolique du Trône, du Prince Héritier et du cercle rapproché royal, est de ceux-là : un signe que l’histoire de la tariqa s’écrit désormais autour de lui.