Bank Al-Maghrib (BAM), la banque centrale du Maroc, a publié son tableau de bord « Crédits-Dépôts bancaires » pour janvier 2025, ainsi que des données complémentaires issues de son enquête de conjoncture du quatrième trimestre 2024 (T4-2024). Ces rapports dressent un panorama détaillé de l’évolution des crédits, des dépôts et des conditions de financement dans le Royaume, tout en mettant en lumière la montée en puissance du financement participatif.
Crédits bancaires : une croissance modérée de 4,1 %
L’encours global du crédit bancaire s’élève à 1 134,7 milliards de dirhams (MMDH) à fin janvier 2025, enregistrant une progression annuelle de 4,1 %. Cette hausse reflète des dynamiques contrastées selon les secteurs :
- Les agents non financiers absorbent 946,1 MMDH, tandis que les agents financiers se partagent 188,6 MMDH.
- Pour les entreprises non financières privées, les concours progressent de 1,2 %, portés par une forte hausse des crédits à l’équipement (+8,4 %) et des prêts à la promotion immobilière (+7,5 %). En revanche, les facilités de trésorerie reculent de 3,3 %, signe d’une prudence dans la gestion de liquidité à court terme.
- Les ménages affichent une croissance de 2 %, tirée par les prêts à l’habitat (+1,9 %) et les crédits à la consommation (+1,8 %).
Dépôts bancaires : une dynamique robuste à +7,6 %
Les dépôts bancaires atteignent 1 241 MMDH, en hausse annuelle de 7,6 %, dépassant ainsi la croissance des crédits. Cette progression témoigne d’une épargne soutenue dans un contexte économique incertain :
- Les ménages contribuent à hauteur de 917,9 MMDH (+7,1 %), dont 208,9 MMDH proviennent des Marocains résidant à l’étranger (MRE), un segment clé pour la liquidité bancaire.
- Les entreprises non financières privées enregistrent une envolée de leurs dépôts à 225,6 MMDH (+12,7 %), signalant une accumulation de trésorerie, possiblement en prévision d’investissements futurs.
Par ailleurs, les taux de rémunération des dépôts à terme diminuent : 2,23 % pour les dépôts à 6 mois (-10 points de base) et 2,67 % pour ceux à 12 mois (-33 points de base). Le taux minimum des comptes d’épargne pour le premier semestre 2025 est fixé à 2,21 % (-27 points de base), reflétant une baisse généralisée des rendements.
Financement participatif : la Mourabaha immobilière en plein essor
Le financement participatif, notamment sous la forme de la « Mourabaha immobilière », poursuit sa montée en puissance. À fin janvier 2025, son encours atteint 25,1 MMDH, contre 21,8 MMDH un an plus tôt, soit une hausse implicite de 15,1 %. Cette progression illustre l’attrait croissant des Marocains pour des solutions de financement conformes aux principes de la finance islamique, particulièrement dans le secteur de l’habitat.
Conditions de financement : des signaux encourageants au T4-2024
L’enquête de conjoncture de BAM pour le quatrième trimestre 2024 révèle une amélioration des conditions d’accès au financement :
- Perception des industriels : 75 % jugent l’accès au crédit « normal », contre 16 % qui le considèrent « difficile ».
- Coût du crédit : Stable selon 87 % des entreprises, en baisse pour 10 %.
- Critères d’octroi : Assouplis pour les crédits de trésorerie, à l’équipement et aux ménages (habitat et consommation), mais durcis pour les prêts à la promotion immobilière.
- Demande de crédit : En hausse pour tous les types de prêts (trésorerie, équipement, habitat, consommation), tant pour les grandes entreprises (GE) que pour les très petites, petites et moyennes entreprises (TPME).
Les taux appliqués aux nouveaux crédits reculent légèrement à 5,26 % (-7 points de base), avec des disparités : 5,08 % pour les GE et 5,70 % pour les TPME. Pour les ménages, les taux des prêts à la consommation baissent à 6,99 % (-7 points de base), tandis que ceux des prêts à l’habitat restent quasi-stables à 4,75 %.
Analyse : une économie en transition
Ces chiffres traduisent une économie marocaine en phase de consolidation. La croissance modérée des crédits (+4,1 %) contraste avec celle, plus soutenue, des dépôts (+7,6 %), suggérant une prudence des acteurs économiques face à un environnement incertain. Le dynamisme des dépôts des entreprises (+12,7 %) pourrait préluder à une reprise de l’investissement, tandis que la progression du financement participatif reflète une diversification des besoins financiers.
La légère baisse des taux d’intérêt, combinée à un assouplissement des conditions d’octroi, indique une politique monétaire favorable à la relance, bien que des défis subsistent, comme l’accès encore jugé difficile par certains industriels.
Perspectives
Les données de BAM seront à surveiller dans les prochains mois pour confirmer ces tendances. La capacité des banques à transformer les liquidités abondantes en crédits productifs, ainsi que l’évolution du financement participatif, seront déterminantes pour soutenir la croissance économique en 2025.