Un projet confidentiel circulant au sein de l’administration Trump, révélé par le Washington Post, esquisse une vision radicale pour l’avenir de Gaza. Le document de 38 pages propose de placer l’enclave sous une tutelle américaine d’une durée minimale de dix ans, période durant laquelle le territoire serait transformé en hub touristique et technologique, surnommé « Riviera du Moyen-Orient ».
Un déplacement massif de population
Le plan, baptisé Gaza Reconstitution, Economic Acceleration and Transformation Trust (GREAT Trust), prévoit le départ « volontaire » des plus de 2 millions de Palestiniens de Gaza, soit vers des pays tiers, soit dans des zones sécurisées restreintes à l’intérieur de l’enclave pendant la reconstruction. Chaque famille disposerait d’un « token » numérique en échange de ses droits fonciers, pouvant être converti en appartement dans les nouvelles « smart cities » promises ou utilisé pour financer une vie ailleurs.
Un paiement en espèces de 5 000 dollars et une aide couvrant quatre années de loyer et une année de nourriture seraient proposés à ceux qui choisissent de quitter l’enclave.
Le prospectus met en avant des « méga-projets » financés par des investisseurs privés et publics, sans recours direct aux fonds du gouvernement américain. Parmi les infrastructures envisagées : usines de véhicules électriques, data centers, ports, aéroports, resorts balnéaires et cités intelligentes dotées de parcs, hôpitaux et écoles.
Selon les projections, un investissement de 100 milliards de dollars pourrait quadrupler en dix ans. Les promoteurs comparent le projet à la reconstruction du Japon après 1945 ou aux tutelles américaines dans le Pacifique.
Donald Trump a récemment réuni au sein de la Maison Blanche le secrétaire d’État Marco Rubio, l’envoyé spécial Steve Witkoff, ainsi que Tony Blair et Jared Kushner pour discuter des scénarios de l’après-guerre. Aucune décision officielle n’a été annoncée, mais le projet du GREAT Trust reprend plusieurs éléments de la vision exprimée publiquement par Trump : « prendre possession » de Gaza et en faire une vitrine économique régionale.
Si le plan promet « volontariat » et « prospérité », il soulève déjà des accusations de violation du droit international, notamment en cas d’empêchement du retour des habitants dans leurs foyers. Les pays arabes, qui défendent une solution menant à un État palestinien, n’ont pas donné leur aval. Plusieurs noms de pays africains et asiatiques ont été évoqués comme hôtes potentiels pour accueillir des déplacés, mais aucune confirmation officielle n’a suivi.

Du côté israélien, le Premier ministre Benyamin Netanyahou n’a jamais exposé de vision claire pour Gaza au-delà de la neutralisation du Hamas, mais certains membres de son gouvernement prônent ouvertement l’annexion et la colonisation du territoire.
Pour Trump, Gaza, aujourd’hui « site de démolition », recèle un potentiel unique : « sur la mer, avec le meilleur climat », selon ses mots. Il promet d’en faire un joyau touristique et technologique. Mais pour beaucoup de Palestiniens, l’idée de quitter leur terre reste inacceptable, quelle que soit la compensation proposée. Comme le résume un habitant de Khan Younis interrogé par le Post : « C’est ma patrie. Je refuse d’être déplacé ailleurs. »