Maroc : Entre aggravation du déficit commercial et recul des exportations

Le déficit commercial du Maroc s’est aggravé davantage à fin mars 2025, selon les données publiées par l’Office des changes. Il s’est établi à 71,63 milliards de dirhams (MMDH) au cours des trois premiers trimestres de cette année contre -61,2MMDH un an auparavant, marquant ainsi une aggravation de 16,9%. 

Ce nouveau recul de la balance commerciale découle d’un accroissement plus marqué des importations (+6,9% ou +12,08 MMDH) que des exportations (+1,5% ou +1,71 MMDH), ressort-il dans son Bulletin sur les indicateurs mensuels des échanges extérieurs de mars 2025 qui fait également état d’un recul de 3,3 points du taux de couverture à 61,8% au lieu de 65,1% un an auparavant. 

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Source : Office des Changes

Quoi qu’il en soit, les données suggèrent que le solde des échanges a été plombé principalement par la baisse des exportations des secteurs « Electronique et électricité » (11,6% à 4,21 MMDH), « Automobile » (7,8% à 37,36 MMDH) et « Textile et cuir » (1,4% à 11,51 MMDH), suite respectivement à la forte baisse des ventes des « composants électroniques » (-49,1%) et des « Electroaimants et autres dispositifs magnétiques » (-90%), des segments « Construction » (-23,7%) et « Extérieur » (-14,2%) ainsi que « Vêtements confectionnés » (-0,4%), « Maroquinerie » (-13,3%) et « Chaussures » (-3,6%). 

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Source : Office des Changes

Il est important de rappeler que « le déficit commercial constitue un indicateur important pour évaluer la performance d’une économie, d’une industrie, d’une monnaie et définir les actions correctrices », comme le relève souvent dans sa communication le cabinet Eurofiscalis International Firm, expert en commerce international.  

Aussi, plusieurs économistes conviennent que la dépendance à l’égard de l’importation, une monnaie nationale surévaluée, la faiblesse de la compétitivité des entreprises nationales sur le marché international et le manque de diversification des exportations font partie des causes pouvant expliquer un déficit commercial. 

Il convient de rajouter également d’autres facteurs comme les taux de change, l’épargne nationale et les investissements de même que les politiques gouvernementales, ainsi qu’« une forte monnaie intérieure (qui) peut rendre les exportations plus coûteuses, entraînant une diminution des exportations et une augmentation des importations, contribuant ainsi à un déficit commercial », argumente FasterCapital, un incubateur/accélérateur virtuel à l’échelle mondiale. 

Un faible taux d’épargne nationale et le niveau élevés des investissements sur le marché national peuvent intensifient les importations, ce qui conduit aussi à un déficit commercial, assure-t-il. 

Qu’à cela ne tienne, selon données du commerce extérieur, élaborées sur la base des déclarations douanières, les importations ont atteint 187,7 MMDH à fin mars 2025 contre 175,61 MMDH une année auparavant. 

Les importations des produits bruts en forte progression 

Ainsi, les produits bruts ont atteint 9,36 MMDH au premier trimestre 2025 contre 7,33 MMDH un an auparavant, marquant une forte hausse de +27,6%, « suite, essentiellement, à la hausse des achats des soufres bruts et non raffinés (+749 MDH), de ferraille, déchets et autres minerais (+498 MDH) et de l’huile de soja brute ou raffinée (+450 MDH) », selon l’Office. 

Les produits alimentaires ont de leur côté progressé de +9,4% à 23,94 MMDH, en raison de la hausse des importations des animaux vivants (+1,40 MMDH), et du maïs (+660 MDH), a-t-il fait savoir indiquant en revanche un recul des achats du blé de -2,06 MMDH durant la même période. 

D’après l’Office, la hausse des produits finis de consommation (+8,7% à 43,59 MMDH) s’explique par l’augmentation des achats des médicaments et autres produits pharmaceutiques (+20,2% ou +504 MDH), des cycles et motocycles, leurs parties et pièces (+78,7% ou +300 MDH) et des sièges, meubles, matelas et articles d’éclairage (+22,6% ou +271 MDH), selon les explications de l’Office des changes. 

Des indicateurs mensuels des échanges extérieurs de mars 2025, il ressort par ailleurs que l’augmentation des importations de produits finis d’équipement (+6,1% à 43,04 MMDH) est due à l’accroissement des achats des machines pour le travail du caoutchouc ou des plastiques (+435 MDH), des machines et appareils divers (+415 MDH) et des centrifugeuses et appareils pour filtration des liquides ou des gaz (+401 MDH). 

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Source : Office des Changes

Quant aux demi produits et à « l’énergie et lubrifiants », les données montrent qu’ils ont augmenté respectivement de  +4,3% à 39,17 MMDH et de +0,5% à 28,22 MMDH. 

La hausse des premiers s’explique par l’augmentation des importations de l’aluminium brut, déchets et poudres d’aluminium (+65,2% à +394 MDH), des produits chimiques (+10,6% à +386 MDH) et des achats des accessoires de tuyauterie et construction métallique (+44,4% à +368 MDH). 

Celle de « l’énergie et lubrifiants » est attribuée essentiellement à la hausse des importations de « Gaz de pétrole et autres hydrocarbures » (+13,7 à +711 MDH) et de l’Energie électrique (+100% à +199 MDH), alors que les importations de Gas-oils et fuel-oils ont reculé de 7,4% à – 1,05 MMDH. 

Des exportations stimulées par les « Phosphates et dérivés » et « Autres extractions minières » 

Pour leur part, les exportations ont été stimulées par le secteur des « Phosphates et dérivés » (+18,2% à 20,3 MMDH), suite principalement, à la hausse des ventes des engrais naturels et chimiques (+1,91 MMDH) et dans une moindre mesure des phosphates (+696MDH) et de l’acide phosphorique (+511MDH).  

Elles ont également été soutenues par les « Autres extractions minières » (+20,2% à 1,38 MMDH), grâce à une amélioration des ventes du Sulfate de baryum (+46,4 à +117 MDH), des minerais de plomb (+29,4% à +53 MDH) et de cuivre (+10,7% à +39 MDH). 

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Source : Office des Changes

Tout comme par les « Autres industries » qui ont progressé de +16,8% à 7,52 MMDH, en raison d’une hausse des exportations de métallurgie et travail des métaux (+29,8% à 474 MDH) et de l’industrie plastique et du caoutchouc (+9,9% à 39%), en dépit du recul de l’Industrie pharmaceutique (-21,6% à -85 MDH). 

De l’avis de l’Office, la hausse des exportations aéronautiques (+15% à 7,03 MMDH) s’explique par l’accroissement des ventes du segment de l’Assemblage de +17,9% à +689 MDH et des exportations du segment EWIS de 10,4% à +232 MDH.  

Notons enfin le léger accroissement enregistré dans l’« Agriculture et agro-alimentaire » (+0,8% à 26,74 MMDH), suite à l’amélioration des exportations de l’agriculture, sylviculture et chasse de +7,5% à +1,11 MMDH, alors que celles de l’industrie alimentaire accuse une baisse de 7,7% à -863 MDH. 

Déficit commercial, faut-il s’en inquiéter ?

Survenant lorsque la valeur des importations de biens et de services d’un pays dépasse celle de ses exportations, le déficit commercial peut être néfaste, dans certains cas, comme bénéfique pour l’économie d’un pays, selon le contexte et la durée du déséquilibre. 

Certains experts notent qu’il peut réduire la croissance économique et la production nationale, en étouffant la demande de biens et services nationaux, dissuader l’innovation et l’efficacité ou encore se traduire par un accroissement des sorties de capitaux nationaux. 

« Lorsqu’un pays importe plus qu’il n’exporte, cela peut entraîner des pertes d’emplois dans les industries nationales qui concurrencent les produits importés », soulignent-ils ajoutant que le déficit commercial peut également affecter le taux de change en créant une pression à la hausse sur la devise étrangère, ce qui peut rendre les importations moins chères et les exportations moins compétitives. 

Il peut, par ailleurs, entraîner un endettement accru du pays. « Un déficit commercial peut affecter la dette nationale en augmentant les emprunts auprès des créanciers étrangers, ce qui peut augmenter les paiements d’intérêts et le fardeau de la dette », explique-t-on. 

Quoi qu’on en dise, les déficits commerciaux peuvent également apporter des avantages aux consommateurs en leur permettant d’accéder à une plus large gamme de biens à des prix inférieurs. 

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