Mustafa Elfanne a publié sur Adare.ma un article incisif concernant le ministre Abdellatif Ouahbi, figure centrale d’un débat intense au sein de l’opinion publique. À travers une plume à la fois critique et mesurée, Elfanne propose une analyse multidimensionnelle de la personnalité publique qu’incarne Ouahbi. S'il affirme son attachement à la liberté de critique, essentielle pour tout responsable public, l’auteur met en garde contre les dérives de certains discours qui, selon lui, flirtent dangereusement avec la diabolisation. Par ailleurs, il souligne le rôle central joué par Ouahbi dans la réhabilitation du Parti Authenticité et Modernité, contribuant ainsi à sa transformation en une force politique plus conventionnelle et moins controversée.
Mustafa Elfanne commence par rappeler un principe fondamental : « l’égalité devant la critique ». Tout citoyen, journaliste ou activiste a le droit de critiquer un responsable public, surtout lorsqu’il occupe un poste aussi sensible que celui de ministre de la Justice, poste historiquement lié à la stabilité de l’État. Ce droit, comme Elfanne le souligne à juste titre, est inhérent à la démocratie. Cependant, il met en garde contre une critique qui s’éloigne de l’évaluation objective des actions politiques pour glisser vers la « diabolisation ». En effet, Elfanne rappelle que, bien que l’erreur soit humaine, la critique doit rester mesurée et ne doit jamais devenir une forme de lynchage public ou de chasse aux sorcières.
L’un des aspects les plus frappants de l’article est la manière dont Elfanne aborde la réaction publique à certaines déclarations d’Abdellatif Ouahbi. Selon l’auteur, ces déclarations ont été exagérément interprétées comme un affront à la religion et aux croyances des Marocains. Or, Elfanne met en lumière une réalité troublante : le recours à la religion pour discréditer un adversaire politique est une arme dangereuse. Il qualifie ces excès de « semi-fatwa », insinuant que ce type de discours pourrait mettre en péril la sécurité personnelle de Ouahbi. Une telle manipulation du sentiment religieux, dans un contexte politique, expose la société à des risques de dérives idéologiques graves.
Ce que Mustafa Elfanne réussit dans son article, c’est d’humaniser Abdellatif Ouahbi, sans pour autant l’absoudre de ses responsabilités. Il défend l’idée qu’aucun responsable ne devrait être au-dessus de la critique, mais il dénonce également l’injustice de certaines accusations portées contre Ouahbi. Les erreurs de communication de ce dernier sont, selon Elfanne, le reflet de sa spontanéité et de son naturel, des qualités qui peuvent facilement prêter à des malentendus, surtout dans un contexte politique où chaque mot est scruté.
Elfanne rappelle que l’essence même de la démocratie est de permettre la critique tout en respectant l’intégrité humaine. Le climat actuel, où certains responsables publics sont transformés en boucs émissaires, ne peut que fragiliser le débat politique. En particulier, l'auteur note avec inquiétude l'inconscience de ceux qui ont qualifié nommément Abdellatif Ouahbi de « ministre du vice », l'accusant de promouvoir la dépravation et le péché. Ce type de discours, irresponsable et dangereux, détourne le débat légitime et met en péril non seulement l'image du ministre, mais aussi son intégrité physique, en attisant les tensions au sein de la société.
De plus, cette approche non seulement simplifie dangereusement les enjeux, mais elle met également en lumière un malaise plus profond dans la manière dont le religieux est instrumentalisé à des fins politiques.
Enfin, Elfanne revient sur la transformation du Parti Authenticité et Modernité (PAM) sous la direction d'Abdellatif Ouahbi. Dans son analyse, il souligne que Ouahbi a opéré une rupture notable avec l’héritage controversé de certains anciens dirigeants du parti, pour en faire une organisation plus proche des réalités politiques du pays. Elfanne reconnaît que le PAM, sous Ouahbi, n’est plus perçu comme cette structure parallèle à l’État, un «parti-fantôme», mais plutôt comme un acteur politique «conventionnel». Cette normalisation du PAM, bien qu’elle ait exposé Ouahbi à de nouvelles critiques, est perçue par Elfanne comme une réussite politique.