Soucieux de réduire la présence des forces américaines et leur budget dans le Moyen-Orient, Donald Trump pousse de toutes se forces en faveur de la création d’un OTAN arabe qui comprendrait la Jordanie, l'Égypte, le Bahreïn, le Qatar, le Koweït, les Émirats arabes unis, Oman et l'Arabie saoudite. L’idée de départ, formulée par Barack Obama était de créer une alliance judéo-sunnite pour combattre le chiisme, mais pas seulement. Toutefois, ce projet a peu de chances d’aboutir.
Depuis deux ans, les Etats-Unis œuvrent inlassablement pour la création d’une alliance militaire au Moyen-Orient appelée Middle East strategic alliance (MESA). Cet engagement n’est pas désintéressé. Si officiellement, cette alliance est destinée à contenir l’interventionnisme des Mollahs en Iran et de contenir l’influence de la Russie et de la Chine, en réalité, la création de cet Otan arabe aura pour but de «partager la charge financière» assumée par les Etats-Unis pour la défense de la région. Il y a quelques mois, Donald Trump a été très explicite : « Il faut que vous payer pour notre protection », lançait-il aux Saoudiens, qui espèrent commander cette alliance. L’Arabie saoudite, soucieuse de son leadership, veut commander une force de plus de 300.000 soldats, 5.000 chars et 1.000 avions de combat. Le budget annuel serait de 100 milliards de dollars.
Quelles chances a cet OTAN arabe d’aboutir ? Très peu. Premièrement, l’Egypte, plus grande armée arabe, a annoncé son retrait du projet le 14 avril dernier. Elle estime ne pas avoir d’objectif stratégique commun avec les autres Etats susceptibles d’y participer et ne voit pas de raison de mettre son armée sous commandement saoudien. De plus, la concrétisation de ce projet est compromise en raison des divergences au sein du Conseil de coopération du Golfe. Ce bloc n’a pas pu faire face à l’hégémonie iranienne et à son intervention en Syrie et au Yémen.
"Egypt has pulled out of the U.S. effort to forge an “Arab NATO” with key Arab allies" https://t.co/ME7NndYso5
— Strategic Sentinel (@StratSentinel) April 11, 2019
Le blocus imposé au Qatar depuis un an et quelque n’arrange pas aussi les choses. Si l’Arabie Saoudite, les Emirats arabes unis et le Bahreïn sont partants pour cette alliance, le Koweït, le Qatar, Oman trainent des pieds. La Jordanie, qui pourrait participer à cette alliance, a, elle, d’autres priorités. En février 2015, le Président américain Barack Obama a évoqué un projet d’une alliance israélo-arabe. L’idée sera reprise par la Ligue arabe la même année sans mentionner Israël sous forme de « Force arabe de Défense commune ». En 2018, Donald Trump avait évoqué la possibilité pour l’Arabie saoudite de prendre le commandement de l’OTAN arabe. L’intérêt des Américains pour cette alliance est motivé par leur désir de trouver des débouchés pour leur industrie militaire. Le rôle que jouera le Pentagone et Israël, qui entretient des relations avec des monarchies du Golfe, favoriseront la compatibilité des armes entre les différentes armées régionales et à maintenir l’achat d’armes américaines. Les manœuvres interarmées d’Arab Shield 1 (Bouclier arabe 1) sont à inscrire dans ce cadre. Selon Jean-Sylvestre Mongrenier,
Chercheur à l’Institut Français de Géopolitique, Chercheur associé à l’Institut Thomas More, « cette alliance serait destinée à protéger la région de la double menace de l’expansionnisme irano-chiite et du djihadisme de facture sunnite. Au vrai, il s’agit d’un serpent de mer. Sans remonter au “Pacte de Bagdad” (1955), rapidement vidé de sa substance, plusieurs initiatives ont vu le jour ces dernières années ». Les cafouillages de la coalition arabe et sunnite en 2015 au Yémen regroupant plus de quarante Etats ne militent pas en faveur d’un OTAN arabe. Selon le chercheur, « si le projet d’“OTAN arabe” n’est pas dépourvu de rationalité géopolitique, sa traduction concrète demeure hypothétique, l’état dans lequel se trouve le CCG n’étant pas de bon augure ».
L'Irak médiateur entre l’Iran et l’Arabie saoudite ?
Le Parlement irakien a organisé samedi à Bagdad, une réunion à laquelle ont participé les présidents et les délégations des Parlements des six voisins de l’Irak, dont l’Iran, la Jordanie, le Koweït, l’Arabie saoudite, la Syrie et la Turquie. Lors de cette réunion placée sous le slogan de « la stabilité et le développement de l'Irak », l'Iran a été représenté par un député, ancien chef de commission parlementaire.
Il s'agit là d'une opération diplomatique compliquée pour Bagdad qui tente d’un côté de renforcer ses relations avec l’Arabie saoudite, alliée des États-Unis, et de l’autre, de préserver ses liens avec le régime iranien. Un rôle de médiateur entre ses voisins rivaux, qui vient contrebalancer la piste d'un OTAN arabe anti-Iran.