Sommet Erdogan, Poutine, Rohani sur la Syrie : de la difficulté de trouver son chemin de Damas

La Syrie se trouve au cœur de toutes les convoitises régionales et internationales en raison notamment de sa position géostratégique. Les jeux et les enjeux sur l’échiquier syrien mettent aux prises des intérêts et des axes diamétralement opposés.

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La crise syrienne déclenchée dans le sillage de ce qu’on a abusivement qualifié de «printemps arabe» a débouché sur une guerre civile ayant coûté jusqu’à présent la vie à plus de 350 000 personnes, des millions de déplacés à l’intérieur du pays qu’à l’étranger et la destruction massive des infrastructures.

7 ans après, le régime syrien est toujours en place et Bachar Al-Assad toujours debout. Dans cette guerre destructrice faite par procuration au nom de puissances régionales et internationales, on a vu comment des groupes terroristes financés par des Etats de la région, ont donné naissance à des hydres telle que Daech et l’envoi de dizaines de milliers de jeunes notamment arabes envoyés au casse pipe au nom d’un Jihad fallacieux.

Cette paix a commencé sa gestation lors du sommet de Sotchi en novembre 2017 où l’on a qualifié la rencontre tripartite entre Poutine, Erdogan et Rohani d’une « Conférence de Yalta II ».

La sainte alliance contre le régime syrien, qui était au bord de la chute, a obligé la Russie d’intervenir massivement -surtout que ce pays constitue le seul «port d’attache» de Moscou au Moyen-Orient- et l’Iran, de voler au secours de son allié alaouite Bachar Al Assad.

En face, on a vu la Turquie, avec l’appui notamment de régimes du Golfe, soutenir la rébellion et certaines factions extrémistes sunnites tout en traquant les Kurdes syriens qualifiés de terroristes par Erdogan et qui ont payé un lourd tribut contre Daech et les autres mouvements terroristes.

Face à l’échec de trouver une issue à la crise en dépit des réunions entre oppositions et régime sous la houlette de l’Onu ou des superpuissances, la Russie, la Turquie et l’Iran ont décidé de prendre en commun les choses en main et imposer leur « paix ».

Le Sommet d’Ankara consacre de facto le partage de la Syrie en zones d’influence entre Moscou, Téhéran et Ankara.

Cette paix a commencé sa gestation lors du sommet de Sotchi en novembre 2017 où l’on a qualifié la rencontre tripartite entre Poutine, Erdogan et Rohani d’une « Conférence de Yalta II ».

C’est dans cet esprit et pour finaliser leur accord, que les trois hommes se sont réunis ce mercredi à Ankara. Ce sommet a été sanctionné par un communiqué commun dans lequel Erdogan, Poutine et Rohani se sont engagés à « coopérer pour arriver à un cessez le feu durable et accélérer leurs efforts pour assurer le calme sur le terrain et protéger les civils dans les zones de désescalade et de faciliter un accès rapide de l’aide humanitaire à ces zones ».

Ils se sont mis d’accord à éliminer complètement les groupes terroristes dont Daech, Front Al Nosra et Al Qaida.

Les trois hommes sont d’accord pour affirmer qu’il n’y a pas d’issue militaire à la crise et que la seule solution est de ramener à la table des négociations le régime syrien et l’opposition.

C’est dans ce sens qu’ils ont du quatrième round des pourparlers d’Astana conclu le 4 mai 2017 pour l’instauration de « zones de désescalade » dans le but d’arriver à une trêve durable. Le troisième sommet dont la date n’a pas été précisée aura lieu en Iran à l’invitation du chef de l’Etat iranien, Hassan Rohani.

Le Sommet d’Ankara consacre de facto le partage de la Syrie en zones d’influence entre Moscou, Téhéran et Ankara. Toutefois, la paix semble difficile à atteindre surtout qu’Ankara, qui occupe désormais une partie du territoire syrien, n’est pas prête à lâcher du lest considérant la Syrie comme étant sa profondeur stratégique et tenant à ne pas tolérer une région kurde autonome.

A côté de ces trois «vainqueurs», on retrouve à l’autre bout les perdants, notamment l’Arabie saoudite et ses alliés du Golfe en dépit des dizaines pour ne pas dire des centaines de milliards de dollars dépensés pour en finir avec le régime syrien ; les Etats-Unis qui ne savent plus quelle stratégie opter face à ces derniers développements. Donald Trump ne cesse de répéter ces derniers jours qu’il veut retirer ses troupes de Syrie ; et comme le Prince héritier saoudien a exprimé le souhait de leur maintien, le locataire de la Maison Blanche, en bon homme d’affaires, lui a rétorqué de payer l’ardoise, alors que les conseillers du Pentagone et du Département d’Etat pensent le contraire, plaidant pour le renforcement de la présence américaine, tout en estimant qu’il est de leur devoir de soutenir et protéger les Kurdes.

L’autre perdant n’est autre qu’Israël, en dépit de l’aide massive apportée à Daech pour affaiblir le régime syrien et qui fait tout pour contenir la grosse présence iranienne. Il faut dire que dans tout ce magma, il est très difficile de trouver son chemin de Damas !

Noureddine Boughanmi, journaliste polyglotte avec plus de trois décennies d'expérience dans différents supports marocains et étrangers. Passionné de littérature, d'actualité et d'art, il a interviewé, en français, en anglais et en arabe des dizaines d'acteurs politiques de renommée mondiale. Durant les années 1980 et 1990 il a roulé sa bosse entre la Tunisie, la France, l'Indonésie, l'Afrique du Sud avant de s'installer définitivement au Maroc

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