En saisissant la Cour internationale de Justice après la destruction d’un drone malien par l’armée algérienne, Bamako met à nu les dérives d’un régime accusé de violer le droit international et de multiplier les actes hostiles à ses voisins. De plus en plus isolée, l’Algérie apparaît comme un facteur de déstabilisation pour le Sahel et, au-delà, pour l’ensemble du continent africain.
Le gouvernement du Mali a officiellement saisi la Cour internationale de Justice (CIJ) à La Haye, accusant l’Algérie d’avoir détruit un drone de reconnaissance des Forces armées et de sécurité maliennes lors d’une mission de surveillance menée dans la nuit du 31 mars au 1er avril 2025, sur le territoire malien.
Bamako considère cet acte comme une agression caractérisée et une violation flagrante du principe de non-recours à la force, consacré par la Charte des Nations Unies (1945) et rappelé par la résolution 3314 de l’Assemblée générale (1974) définissant l’agression.
Le fondement juridique de la plainte
Dans sa requête, le Mali souligne que l’incident constitue une atteinte aux principes fondamentaux :
- Charte des Nations Unies (1945), qui proscrit l’usage de la force dans les relations internationales ;
- Acte constitutif de l’Union africaine (2000), qui érige la souveraineté et l’intégrité territoriale en principes fondateurs ;
- Pacte de non-agression et de défense commune de l’UA (2005), que l’Algérie a signé.
En portant l’affaire devant la CIJ, Bamako entend démontrer que le droit international doit s’imposer face aux actions unilatérales qui portent atteinte à la stabilité régionale.
La saisine du Mali repose sur l’article 40 du Statut de la Cour et l’article 38, paragraphe 5, de son règlement. Conformément à ce mécanisme, la requête a été transmise au gouvernement algérien. Mais la procédure ne pourra s’engager que si Alger accepte la compétence de la Cour.
L’Algérie et la doctrine de violation de souveraineté de ses voisins
L’Algérie, déjà critiquée pour son rôle ambigu dans la crise sahélienne, voit son image une nouvelle fois écornée. Bamako lui reproche d’entretenir une « proximité avec les groupes terroristes », notamment dans les zones frontalières, une accusation qui alourdit le contentieux sécuritaire entre les deux pays.
Cette défiance avait déjà trouvé une expression politique majeure en janvier 2024, lorsque la junte malienne avait annoncé la « fin, avec effet immédiat » de l’accord de paix d’Alger, signé en 2015 et longtemps considéré comme un pilier de la stabilisation du Mali. Aux yeux de Bamako, le rôle de médiateur revendiqué par Alger est désormais discrédité, et son voisin apparaît davantage comme un acteur de l’instabilité que comme un garant de la paix.
En saisissant la CIJ, le Mali réaffirme que sa souveraineté n’est pas négociable et que la stabilité régionale ne saurait se bâtir sur l’ingérence. Ce choix place la communauté internationale devant ses responsabilités, en inscrivant le différend dans le cadre multilatéral de la justice internationale.
La riposte d’Alger : « refus de procédure » à la CIJ
L’Algérie a réagi à la saisine malienne en dénonçant une requête « trop grossière pour être crédible ». Dans un communiqué du 19 septembre, le ministère algérien des Affaires étrangères a rejeté les accusations de Bamako, affirmant que les radars de son armée de l’air démontrent au contraire la violation de l’espace aérien algérien par un drone malien.
Alger considère la plainte comme une « tentative d’instrumentalisation » de la CIJ et a annoncé qu’elle notifiera « en temps opportun » son refus de procédure, condition préalable à tout examen par la Cour.