Infox, arme puissante dans la guerre de l’information – Partie II

Décidément, la guerre d’information bat son plein et n’épargne aucun territoire ni aucun domaine. Sur le1.ma, nous avons traité, rien que ce mois-ci, deux batailles de l’information de grande envergure. La première concerne le Président du Nigéria, Muhammadu Buhari, que ses adversaires politiques, les séparatistes Biafra, que nous avons baptisés, ici sur cette publication et à juste titre, le Polisario du Nigéria, ont enterré et cloné. Le Président nigérian était obligé, après plusieurs mois de silence, quand la rumeur s’est propagée au-delà des frontières de son pays, à en parler publiquement à Katowice en Pologne, en marge de sa participation à la COP24. Une sortie médiatique qui a fait le tour du monde. La seconde, concerne le Pacte Mondial sur les Migrations, dont la conférence d’adoption s’est tenue cette semaine à Marrakech. Les mouvements populistes de par le monde se sont mobilisés pour décrier ce “Pacte”, présenté comme le traité mondial de libre circulation universel des migrants. Des mouvements aidés par des positions peu courageuses de gouvernements qui avaient, à peine quelques mois auparavant, applaudi, si ce n’est considérés comme acteurs dans l’élaboration de ce pacte. La pression était tellement importante qu’elle a occupé une part de lion dans les interventions de toutes les délégations, ainsi que dans tous les supports de communication des Nations Unies. Pour ce sujet, le doute s’est installé et d’autres batailles sur les migrations ne font que pointer du nez. C’est dans ce contexte que nous publions aujourd’hui la deuxième partie de la note de synthèse élaborée par l’expert marocain en intelligence stratégique et économique, Anas Chaker, diplômé de l’Ecole de Guerre Economique – EGE Paris. Alors que la première partie publiée le 6 décembre dernier présentait les typologies des fakes news, la seconde et dernière partie, synthétise les pistes de gestion et de protection contre la désinformation.

Qui Manipule l’information ?

Une opération de désinformation n’a pas de schéma et de stratégie fixe. Elle s’adapte au contexte social et politique ainsi qu’aux différentes parties-prenantes qui existent. Ce qui est essentiel à savoir, c’est qu’il n y’a pas de guerre d’information sans qu’il y est derrière une source d’attaque.

Ces attaques informationnelles commencent sous l’impulsion d’un « client » qui est essentiellement le bénéficiaire de l’opération. Ce « client » peut être un état, une entreprise, une organisation, des individus avec des intérêts communs. Le « client » reste généralement dans l’ombre, ce qui rend difficile l’identification de l’origine de ces attaques.

Ce « client » a besoin d’un agent, ou d’un stratège ayant les compétences nécessaires pour mener et gérer une campagne de désinformation.

Les agents furent souvent les services de renseignement lorsque le client final est l’état, mais aussi on trouve des agences privées qui peuvent parfaitement assurer ce rôle.

Ces agents sont à l’origine du schéma tactique de cette guerre de désinformation, dont le but est d’amener le public à croire à cette fake news, mais également de les amener à réaliser le comportement attendu par le manipulateur (le client). Les techniques et les stratégies utilisées dans ce type de guerre sont capables de provoquer un consentement automatique, c’est-à-dire à mener les gens à dire oui et accepter cette désinformation sans réfléchir préalablement.

Ces stratégies peuvent être basées sur des spectres psychologies, politique, ou idéologique. Elles peuvent également choisir une stratégie hybride où la guerre se mène sur l’ensemble du spectre. Du conventionnel à l’informationnel en passant par le cyber et les opérations clandestines.

L’opération de désinformation a besoin également des relais ou bien des « transmetteurs » qui ont un rôle relativement passif, mais pourtant essentiel. Leurs rôles sont de diffuser les fausses nouvelles et les rumeurs partout. Ils y adhérent et contaminent d’autres individus, et rendent efficace la manœuvre. Parfois ils sont de bonne foi et croient vraiment aux messages qu’ils relais.

On peut alors considérer les transmetteurs comme étant des agents involontaires et primordiaux pour la réussite d’une campagne de manipulation par l’information.

Comment gérer et se protéger contre la désinformation ?

La désinformation n’est pas un problème nouveau. Elle touche les états, les entreprises, les personnalités publiques et d’autres victimes, pour cela la nécessité d’avoir des stratégies de contre-attaque ou de contre-influence informationnelle est devenue incontournable. L’enjeu primordial pour les états aujourd’hui est d’avoir une stratégie d’éducation sur les médias dans l’école, ceci afin d’apprendre aux citoyens de penser par eux même, de comprendre le monde tel qu’il est, de se faire leurs propres visions et de ne pas se laisser manipuler et influencer par ceux qui créent la désinformation.

Le combat de nos jours est de posture cognitif. Le rôle de l’école est alors devenu un enjeu de société devant la multiplicité d’information colossal qui circule. Les fausses informations interfèrent avec les informations vérifiées, il est donc important d’apprendre à chaque citoyen de pouvoir analyser l’information avant de se l’approprier.
Ce travail passe à travers l’école, car l’être humain (citoyen) est à la fois victime mais également un facteur clé de cette guerre informationnelle. L’école représente un moyen de protection contre la désinformation.

Le rôle des médias est également essentiel dans cette équation. Leur mission doit être la publication des informations vérifiées en pratiquant du « Fact-cheking » et de ne pas laisser la désinformation dominer et occuper l’espace informationnel.

Face aux attaques informationnelles, une réaction rapide est essentielle. Auparavant les états identifiaient les attaques par les types d’armement et les techniques utilisés. Aujourd’hui à l’ère des guerres virtuelles et informationnelles par le biais des Fake news, le travail de remonter à la source est essentiel afin d’identifier le patient 0, de comprendre et d’analyser l’origine des attaques en suivant une logique de contentement géographique par zone prioritaire (interne et externe), et réagir ensuite à travers 3 étapes :

  1. Identification des patriotes, ou des personnes conscientes de la guerre informationnelle menée contre le pays. Le rôle de l’état est ici de mobiliser ces citoyens pour la défendre.
  2. Identification des neutres. Ces derniers doivent être vaccinés contre l’infox, en leur donnant une explication à travers des campagnes informationnelles contrôlées, et de les mobiliser ensuite pour en faire des patriotes.
  3. Identification des personnes opposées et des sceptiques qui participent d’une manière consciente et volontaire à la diffusion de la désinformation. Ces personnes doivent être neutralisées et séparées entre eux, pour les empêcher de faire des groupes, puis ensuite les ridiculiser et les isoler pour diminuer leur degrés d’influence.

Il est nécessaire de noter qu’il ne faut absolument pas les attaquer (l’humour par exemple permet de ridiculiser en évitant les attaques).

La guerre d’information nécessite une veille continue afin d’éviter et d’anticiper les prochaines attaques. Pour cela il est primordial d’occuper l’espace informationnel et de ne pas laisser le champ de bataille à la portée des manipulateurs. La nature en général a horreur du vide et ne l’accepte pas. Il faut alors que les états soient à l’affut des données pour surveiller son environnement, et contre attaquer le cas échéant. Il ne faut surtout pas minorer et négliger l’effet que peut produire ces attaques.
Enfin la meilleure réponse aux fake news reste la publication des preuves factuelles convaincantes qui prouve le contraire des Infox.

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