Affaire Sarkozy : Ziad Takieddine arrêté au Liban

L'homme d'affaires franco-libanais Ziad Takieddine, un ancien témoin à charge contre l'ex-président français Nicolas Sarkozy, a été arrêté à Beyrouth à la suite d'une notice émise par Interpol.

AFP

«Les forces nationales de sécurité ont placé Takieddine en détention, sur la base d'un mandat d'arrêt d'Interpol adressé au ministère public car il est recherché par les autorités françaises concernant son implication dans une affaire de corruption et de financement de la campagne de M. Sarkozy», a précisé une source judiciaire libanaise.

Elle a ajouté que Takieddine avait été interrogé par les forces de sécurité, sous la supervision d'un juge, et qu'il devait être transféré lundi au parquet général de Beyrouth pour de plus amples investigations.

Mais une source judiciaire en France a affirmé que cette arrestation n'était pas liée à l'affaire de financement de la campagne de M. Sarkozy, sans autre précision.

M. Takieddine, 70 ans, est visé depuis juin au moins par un mandat d'arrêt français, émis par le tribunal de Paris qui l'a condamné à cinq ans de prison dans le cadre de l'affaire Karachi sur des commissions occultes liées à des contrats d'armement avec l'Arabie saoudite et le Pakistan, dont une partie a contribué à financer la campagne présidentielle malheureuse d'Edouard Balladur en 1995. Il était absent au jugement, ayant fui à Beyrouth la veille de sa condamnation.

Extradition?

Ziad Takieddine comparaissait mardi devant le Bureau des crimes financiers du Liban dans une affaire distincte, quand les autorités ont réalisé qu'il y avait une demande pour son arrestation émanant d'Interpol, et il a été placé en détention, selon une source sécuritaire.

Une seconde source judiciaire libanaise a précisé à l'AFP qu'il était possible que l'homme d'affaires soit remis en liberté lundi, mais sous contrôle judiciaire. Ses passeports seront confisqués lundi, a-t-elle relevé.

Le parquet général libanais va demander à la France le dossier de Takieddine et s'il trouve que les accusations contre lui dans ce dossier sont justifiées, il pourrait être jugé au Liban en tant que citoyen libanais, ou être extradé vers la France, a relevé la première source judiciaire libanaise.

Mais, selon une seconde source française, «la France et le Liban n'ont pas conclu de convention d'extradition et le Liban n'extrade pas ses ressortissants nationaux, la procédure pourrait donc très vite s'arrêter là».

En 2016, M. Takieddine a affirmé au site d'informations français Mediapart avoir personnellement remis, en 2006 et en 2007, cinq millions d'euros en liquide provenant de Libye et visant à financer la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy.

Le 11 novembre, dans une volte-face spectaculaire, il a retiré ses accusations contre M. Sarkozy dans un entretien à l'hebdomadaire Paris Match et à la chaîne BFMTV.

Plusieurs affaires financières

Les mises en examen de Nicolas Sarkozy dans l'enquête sur des soupçons de financement libyen de la campagne en 2007 ne s'appuient pas seulement sur les déclarations de l'intermédiaire Ziad Takieddine, a fait savoir le lendemain le procureur national financier.

Une source judiciaire libanaise a souligné vendredi que M. Takieddine était poursuivi au Liban dans plusieurs affaires financières, notamment pour fraude et contrefaçon.

Il a passé deux semaines en prison au Liban --du 26 octobre au 10 novembre-- dans le cadre d'un litige avec son ancien avocat Hani Mourad, avant d'être libéré sous contrôle judiciaire.

Cette plainte, dont l'AFP a obtenu une copie, évoque «menaces, chantages, diffamation, escroquerie, abus de confiance» et non paiement d'honoraires.

Né le 14 juin 1950 dans une grande famille de Druzes libanais, Ziad Takieddine a longtemps travaillé dans la publicité, avant de quitter son pays déchiré par la guerre civile. Dans les années 1980, il a dirigé la station de montagne Isola 2000, dans les Alpes-Maritimes en France.

Reconverti dans la négociation de juteux contrats d'armement, il a fait fortune en mettant à profit ses connexions politiques avant de devenir un «ami encombrant» pour la droite française et un paria cerné par la justice, déroutée par ses déclarations fluctuantes.

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