La complexité de notre ère impose aux acteurs économiques, associatifs et politiques publiques une grande agilité et une remise en question permanente. Les think tanks n'échappent pas à ce mouvement et sont de plus en plus défiés et questionnés sur leur utilité et sur leur impact sur leur environnement. Aux Etats-unis, pays où ils ont vu le jour, il y a un siècle, des voix se sont levées, depuis l'avènement du printemps arabe, pour redéfinir le rôle de ces « réservoirs à pensées » dans un monde en profonde mutation. Dans un article publié par un senior Fellow de l’un des plus anciens think tank des américain, The Hudson Institute, sous le titre « From Think Tank to Do Tank », le chercheur tire la sonnette d’alarme sur le danger, qui plane sur les groupes de réflexion, de devenir « une chambre d'écho intellectuelle de la politique ».
En Europe, la défiance populaire envers les institutions et les politiques à l’occasion des élections européennes de 2014 a poussé chercheurs et politiciens à s’interroger sur le rôle des think tank dans ce contexte tendu. « La solution la plus raisonnable serait de fusionner la société civile autour de ses leaders, dynamiques et entreprenants, dans une sorte de grand « do tank ». Il faut quitter le modèle des « think tanks » pour celui des « do tanks » qui sont sources de légitimité, de crédit, de restauration de l’action publique d’intérêt général », conseillait l’écrivain français, Alexandre Jardin.
Au Maroc, l’Institut Amadeus, fondé en 2008 par Brahim Fassi Fihri a observé et traversé durant 11 ans, les turbulences qui ont secoué le pays et son environnement, commençant par l'effervescence méditerranéenne sous Sarkozy, les répliques du printemps arabe, les défis de l'arrimage politique du Maroc à son continent et les vagues des crises sociales et politiques nationales et régionales. Une courbe d’apprentissage que l’Institut a amené à repenser son modèle afin de préserver son indépendance et son influence. Amadeus a opté de passer de «Thinker» à «Doer», s’offrant ainsi de nouvelles missions et une nouvelle vie.
C’est dans un nouveau siège flambant neuf sur l’avenue Mehdi Ben Barka à Rabat, que l’Institut Amadeus a organisé une rencontre, mardi 9 avril, à laquelle ont assisté des invités triés sur le volet, membres du cabinet royal, ambassadeurs, diplomates et autres décideurs. Une occasion saisie par son président, Brahim Fassi Fihri, pour lever le voile sur le nouveau « Do tank Amadeus ».
Dans sa présentation, le Président d’Amadeus, tout en rappelant le positionnement historique de son institut, a été clair sur les raisons de cette nouvelle orientation : « Je suis soucieux de préserver l’indépendance d’Amadeus, son impact et sa valeur ajoutée en termes d’influence, de débat et de réflexion. C’est pour cela que nous avons fait, après 11 ans d’existence, le choix d’élargir son champ d’action et de diversifier ses activités dans le but de répondre à des besoins en constante mutation et aux attentes d’un nombre croissant d’organismes et d’institutions, tant nationaux qu’étrangers».
L’Institut Amadeus semble vouloir développer une capacité d’initiative et d’action beaucoup plus large à ce qu’elle a fait jusqu’alors. Fort d’une équipe de 20 collaborateurs, l’institut a d'ores et déjà mis en place une offre de service d’accompagnement, de conseil, de communication d’influence, d’intelligence économique, d’analyse stratégique, de production d'événements majeurs et de la formation ciblée.
Brahim Fassi Fihri rassurera par la suite l’audience sur la pérennité du Forum MEDays dans le cadre de ce nouveau positionnement. « MEDays, considéré comme la plus importante conférence internationale non gouvernementale organisée annuellement au Maroc, conservera son identité d'événement non commercial ouvert au public et entretiendra sa vocation première de promotion et de mise en exergue, sur l’ensemble des thèmes abordés, des grandes orientations et des options choisies par le Royaume sous l’impulsion de Roi Mohammed VI » a-t-il précisé.