Le gouvernement français a exhorté la Commission européenne à agir contre la plateforme chinoise Shein, accusée de commercialiser sur son site des poupées à caractère pédopornographique et des armes prohibées, en violation des règles européennes.
Le gouvernement français a appelé jeudi la Commission européenne à enquêter sur la plateforme de commerce en ligne Shein, estimant que l’entreprise chinoise enfreint les réglementations de l’Union européenne en raison de la vente de poupées sexuelles représentant des enfants et d’armes interdites.
Cette démarche intervient après la décision de la France, annoncée mercredi, d’interdire Shein sur son territoire pour ces produits jugés illicites. La société a depuis suspendu son service de marketplace en France afin de revoir le fonctionnement de ses vendeurs tiers, et a cessé la vente de toutes les poupées sexuelles à l’échelle mondiale.
« La plateforme est manifestement en infraction avec les règles européennes », a déclaré le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, sur Franceinfo. « La Commission européenne doit agir, elle ne peut plus attendre », a-t-il ajouté.
Jeudi, le site français de Shein restait accessible mais ne présentait plus que des articles de sa propre marque, sans les produits diversifiés habituellement proposés par des vendeurs tiers.
Dans le cadre du renforcement des contrôles, les ministres du Budget et des Petites entreprises se sont rendus à l’aéroport de Paris-Charles de Gaulle, où ils ont annoncé le blocage de 200 000 colis destinés à être examinés par les services des douanes et de la répression des fraudes.
Le ministre de l’Économie, Roland Lescure, et la ministre déléguée chargée du Numérique, Anne Le Henanff, ont également adressé un courrier à la commissaire européenne Henna Virkkunen pour demander à la Commission d’ouvrir une enquête « sans délai ».
Un porte-parole de la Commission européenne a confirmé que l’exécutif de l’Union était en contact avec Shein à la suite de la plainte française, précisant qu’en cas de violation du droit européen, des mesures pourraient être envisagées, tout en indiquant qu’aucune suspension de plateforme à l’échelle européenne n’était prévue pour l’instant.
Gunther Oettinger, ancien commissaire européen et conseiller de Shein, a indiqué que l’entreprise devait « faire preuve de transparence et, si nécessaire, corriger le tir », ajoutant que les produits concernés avaient déjà été retirés.
En Allemagne, la Fédération du commerce de détail (HDE) a appelé le gouvernement fédéral et les institutions européennes à renforcer leur action face aux plateformes ne respectant pas la réglementation. La fondation de tests de produits Stiftung Warentest a récemment indiqué que 110 des 162 articles examinés provenant de Shein et Temu ne respectaient pas les normes de sécurité de l’Union européenne, évoquant notamment des jouets dangereux et des bijoux contenant des métaux toxiques.
La Commission européenne dispose du pouvoir d’enquêter sur les grandes plateformes numériques dans le cadre du Règlement sur les services numériques (DSA), qui impose la vérification des vendeurs tiers et le contrôle de la conformité des produits. En cas d’infraction, des amendes pouvant atteindre 6 % du chiffre d’affaires mondial peuvent être infligées.
En 2024, Shein a réalisé un chiffre d’affaires mondial de 37 milliards de dollars, selon un dépôt de sa société mère, Roadget Business Pte Ltd, à Singapour.
L’action de la France s’inscrit dans un contexte de vigilance accrue à l’égard des plateformes chinoises telles que Shein, Temu, AliExpress ou Wish, qui expédient directement des produits à bas prix depuis la Chine sans droits de douane pour les colis de moins de 150 euros. L’Union européenne prévoit de supprimer cette exonération en 2028, tandis que la France plaide pour une application anticipée et l’instauration d’une redevance de deux euros par envoi.
En parallèle, la Commission européenne a déjà ouvert une enquête sur Temu pour manquement présumé à la prévention des ventes de produits illégaux. En France, le parquet enquête également sur Shein, Temu, AliExpress et Wish pour des infractions présumées liées notamment à l’accès de mineurs à des contenus pornographiques via leurs plateformes.





