La Libye vit dans le chaos depuis la chute du régime de Mouammar Kaddafi et sa mort le 20 octobre 2011. Livré aux convoitises régionales et internationales, aux dizaines de milices armées et aux tiraillements entre ses 142 tribus, le pays –qui est devenu pratiquement ingouvernable au grand bonheur des mouvements terroristes qui y trouvent refuge et armements et un havre pour les trafiquants en tout genre et à leur tête le trafic de la migration clandestine-, a du mal à retrouver sa cohésion et sa stabilité. En témoignent aussi ses deux gouvernements et ses deux parlements avec une rivalité entre deux hommes forts, à savoir le «patron du grand est» le maréchal Khalifa Haftar à Benghazi et l’actuel premier ministre Faiez el-Sarraj reconnu par la «communauté internationale.» Tous les efforts déployés par cette dernière pour sortir le pays de l’impasse n’ont abouti à aucune issue. On se souvient de l’Accord de Skhirat signé au Maroc en 2015 qui, malheureusement, est demeuré lettre morte malgré le soutien des Etats-Unis et de l’Europe.
L’Accord de Skhirat, dont la légitimité a été réaffirmée le 17 décembre 2017 par l’administration américaine lorsque l’ex-secrétaire d’Etat Rex Tillerson avait reçu le premier ministre libyen Fayez el-Sarraj, comme étant « le seul cadre viable pour une solution politique» durant le processus de transition en Libye, et toutes «les tentatives visant à contourner le processus politique facilité par l'ONU ou à imposer une solution militaire au conflit ne feraient que déstabiliser la Libye et créer des opportunités pour Daech et d'autres groupes terroristes de menacer les Etats-Unis et ses alliés».
Le même jour, qui coïncidait avec le deuxième anniversaire de l’Accord de Skhirat, Khalifa Haftar a répliqué par une déclaration télévisée selon laquelle ledit Accord n’est plus que «de l’encre sur du papier».
Sur ce, la France est entrée dans le jeu libyen. Ainsi, le président Emmanuel Macron a organisé le 27 mai 2018 une conférence internationale à Paris autour des principaux acteurs politiques en Libye dans l’espoir d’une sortie de crise avec le souhait formulé par le Chef de l’Etat français de la tenue d’élections le 10 décembre 2018. Démarche vite contrariée par l’Italie, l’ex-puissance occupante de la Libye qui y voit un vœu pieux français face à une situation très complexe.
Depuis, la Libye sombre chaque jour davantage dans le chaos frôlant de plus en plus la guerre civile. Les derniers affrontements entre milices rivales à Tripoli en sont la parfaite illustration. Et les élections de décembre voulues par Paris s’éloignent de plus en plus du calendrier qui leur était assigné.
La mosaïque politique et partisane n’a pas cessé de chercher la planche de salut à même de sortir le pays du bourbier. Si certains caressent le rêve de remettre sur scelle le clan de Kaddafi en la personne de son fils Seif al-Islam, des notables, des hommes d’affaires, des universitaires et des avocats restés dans le pays ou vivant à l’étranger, notamment dans les Emirats arabes unis, l’Allemagne, la Grande Bretagne ou les Etats- unis avaient commencé des 2013 à réfléchir sur la possibilité de restaurer la monarchie des El-Senussi en organisant une conférence sur le thème en avril 2013 à l’université de Tripoli et depuis, silence radio, jusqu’à ce que l’agence italienne La Presse publie un article sous le titre : Un lobby international s'activerait pour restaurer la monarchie constitutionnelle en Libye.
A en croire le document, ce lobby cherche à remettre sur le trône le prince Mohammed El-Senussi, neveu du dernier roi libyen Idriss El-Senussi, troisième dans l'ordre de succession. Des contacts secrets ont déjà été établis avec certains pays et d’autres réunions sont sur le point d’être organisées pour amener au trône le prince qui vit à Londres et qui est convaincu que la restauration de la monarchie est la seule solution pour mettre fin à la crise politique dans le pays qui dure depuis la mort de l'ancien dictateur Mouammar Kaddafi.
La Presse affirme l’existence de contacts entre Mustapha El Alaoui, lobbyiste d'origine marocaine, résidant aux Emirats Arabes Unis, des groupes de communication stratégique, et le prince El-Senussi, avec le rôle actif du journaliste marocain Aboubakr Jamai. Récemment, un émissaire d’El Alaoui aurait rencontré le prince El-Senussi, qui affirme avoir reçu le feu vert de nombreuses personnalités politiques libyennes, telles que le Premier ministre Fayez el-Sarraj, qu’il a lui-même rencontré et qui lui a conseillé de reconquérir son pays. Des anciens et actuels ambassadeurs, des ministres et des hommes d'affaires libyens qui vivent à Abu Dhabi, Dubaï, en Allemagne et en Autriche ont donné leur accord pour cette initiative.
Le prétendant au trône libyen a déclaré à plusieurs reprises qu'il était favorable au retour dans son pays : il rêve d'être accueilli en triomphe en tant que sauveur de la Libye et des Libyens à qui il a l'intention de promettre une monarchie constitutionnelle avec une nouvelle constitution et des pouvoirs étendus. C’est pourquoi il a fait savoir qu’il avait eu des contacts avec les Italiens et qu’il était allé en Chine, mais en même temps il a refusé de traiter avec la Russie, qu’il n’apprécie pas son intervention militaire en Syrie ou avec les pays du Golfe qu’il accuse d'avoir détruit la région. El Alaoui s'est engagé à aider le prince à utiliser ses bonnes relations avec Moscou et de tenter d'organiser des réunions avec les États-Unis, avec l'Europe ainsi que d'autres pays avec lesquels il prétend avoir des contacts.
Les sources de La Presse soulignent qu'El Alaoui et Jamai refusent toute implication du Maroc dans leur projet, préférant d'autres pays de la région tels que la Tunisie, l'Egypte ou l'Algérie. Un autre partenaire de ce projet n'est autre que l'écrivain journaliste maroco-américain Issandr El Amrani, directeur du Département Afrique du Nord à l'International Crisis Group, qui affirme avoir déjà rencontré le prince Mohammed El-Senussi, rappelant toutefois comment le père du prince avait contribué à la dérive de la monarchie El-Senussi accablée par des cas de corruption avec la classe bourgeoise de l'époque. El Amrani déclare également que le prince lui-même est un aristocrate marié à un membre espagnol de la famille Bourbon d’Espagne. El Amrani, qui connaît l’ambition du prince, affirme également que ce dernier n’est pas étranger aux idées extravagantes: le prince aurait confié son intention d’engager «des Marocains, des Chiliens et d’autres mercenaires à conquérir le pouvoir en Libye».
Si l'implication dans ce projet du lobbyiste Mustapha El Alaoui, grand ami du prince Moulay Hicham, et omniprésent dans de nombreuses affaires de pétrodollar, semblait normale, en revanche des sources contradictoires ont mis en doute la participation de Jamai, grand critique des régimes royalistes.
En attendant de voir plus clair dans ce magma, la Libye mettra beaucoup de temps avant de retrouver paix et stabilité et une vie politique digne de ce nom face au cancer du terrorisme, du banditisme des milices armées et la rivalité fratricide entre les acteurs politiques et leurs différents agendas, le tout sur fond de convoitises internationales de ses richesses.
Je voulais bien savoir ce qui se passe sur le futur de Aisha Ggadaffi qui est en prison à Musquat-Oman