Dans un mémo interne obtenu par The Information, Sam Altman, directeur général d’OpenAI, a livré un message inhabituellement direct à ses équipes. Il y avertit que les prochains mois seront « intenses », en raison de l’accélération brutale de Google et de la montée en puissance d’Anthropic, deux concurrents désormais en position de resserrer l’écart technologique. Cette mise en garde intervient alors que Google vient d’obtenir un soutien retentissant d’une figure majeure de la Silicon Valley : Marc Benioff, fondateur et CEO de Salesforce.
Google change l’équation et séduit les patrons de la tech
Au cœur de l’alerte d’Altman : le déploiement de Gemini 3.0 dans l’ensemble de l’écosystème Google : Search, Android, Workspace. Un déploiement massif qui touche plus de 650 millions d’utilisateurs mensuels, donnant au géant californien une puissance de distribution incomparable.
Selon Altman, cette intégration « invisible et automatique » offre à Google :
- une adoption fluide et naturelle des capacités IA,
- un flux continu de données d’usage,
- un feedback produit massif,
- un levier économique et industriel colossal.
Autrement dit, Google a réussi ce qu’OpenAI ne peut pas faire seul : insérer systématiquement son modèle d’IA dans des usages quotidiens à l’échelle planétaire.
Altman parle d’un « paysage plus exigeant et imprévisible », un message qui reconnaît explicitement le retour en force de Google dans une course où OpenAI occupait, jusqu’ici, l’avant-scène.
Marc Benioff : “Je ne reviens pas en arrière”
Dimanche, le fondateur de Salesforce a publié sur X un commentaire qui a immédiatement fait le tour de la Silicon Valley :
« Holy shit. J’ai utilisé ChatGPT tous les jours pendant 3 ans. Je viens de passer 2 heures sur Gemini 3. Je ne reviens pas en arrière. Le saut est insensé : raisonnement, vitesse, images, vidéo… tout est plus net et plus rapide. J’ai l’impression que le monde vient encore de changer. »
Le message, qui a dépassé le million de vues en quelques heures, a été interprété comme un signe visible d’un réalignement des préférences au sommet de l’industrie, tant Benioff est considéré comme l’un des patrons les plus influents de la tech.
Son témoignage appuie la perception d’Altman : l’intégration profonde de Gemini 3 dans l’écosystème Google bouleverse effectivement la donne.
Un effet d’entraînement parmi les leaders du secteur
Benioff n’est pas le seul dirigeant conquis :
- Andrej Karpathy, ancien directeur IA de Tesla, a parlé d’un modèle « très solide » avec un « potentiel de daily driver tier 1 ».
- Patrick Collison, CEO de Stripe, a salué la capacité de Gemini 3 à créer une page web interactive résumant dix percées en génétique, qualifiant cela de « pretty cool ».
- Même Sam Altman a félicité Google pour le lancement, déclarant : « Looks like a great model. »
Ces réactions renforcent la perception d’un momentum puissant du côté de Mountain View, au moment même où OpenAI s’inquiète d’un resserrement de la concurrence.
Anthropic, l’autre pression silencieuse
Le mémo insiste également sur la progression rapide d’Anthropic, la start-up fondée par d’anciens ingénieurs d’OpenAI.
Selon Altman :
- La série Claude progresse fortement dans les tâches de programmation.
- Les outils entreprise et DevOps rencontrent une adoption accélérée.
- Les performances en sécurité, conformité et productivité séduisent les grands comptes.
Ces avancées obligent OpenAI à accélérer l’évolution de Codex et des outils développeurs, un segment crucial où se jouent les usages professionnels de l’IA générative.
Altman admet que « l’écart se resserre », tout en soulignant la supériorité structurelle d’OpenAI en matière de recherche fondamentale, « un moteur qui continue d’aller vite ».
Le mémo reconnaît également une réalité économique : l’entrée de nouveaux concurrents et la montée des attentes pourraient créer des « vents économiques contraires temporaires ».
Mais Altman reste confiant :
- OpenAI viserait 13 milliards de dollars de revenus en 2025,
- Le financement de la R&D et de l’infrastructure resterait sécurisé,
- Le modèle économique, malgré ses défis, demeure robuste.
Il s’agit moins d’un signal d’alerte financière que d’un appel à la lucidité dans un marché où l’IA devient un secteur industriel mûr, et non plus une niche de pionniers.
La boussole stratégique : la course vers la superintelligence
Une part croissante des équipes recherche d’OpenAI travaille désormais sur le projet central de l’entreprise : atteindre la superintelligence.
Altman reconnaît que jongler entre :
- recherche longue,
- évolution produit,
- exigences infrastructurelles,
« est difficile, souvent frustrant », mais indispensable pour rester le laboratoire qui mène la prochaine rupture technologique.
« Nous devons être à la fois le meilleur labo de recherche, le meilleur constructeur d’infrastructure et la meilleure plateforme produit », écrit-il, une ambition « que je n’échangerais avec aucune autre entreprise »







