Massacre de la Ghouta ou comment Washington tente de faire oublier l’annonce de la victoire contre Daech

En novembre 2017, se tenait le sommet tripartite de Sotchi que nous décrivions à l’époque comme le conclave des «vainqueurs» de Daech. Cette réunion historique devait rapidement produire des mesures décisives pour mettre fin à l’effusion de sang en Syrie et, fait rare, de réunir les Vladimir Poutine et Hassan Rouhani – qui soutiennent le président syrien Bachar al-Assad – autour de la même table qu’Erdogan, qui a soutenu les opposants d’Assad, accueilli les millions de migrants syriens et, paradoxalement, tenu à ce que l’Etat syrien n’éclate pas.

Depuis, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts. Russes et turcs ont resserré leur étau sur les groupes «terroristes» et les Etats-Unis, accusés d’appuyer les positions de Daech en leur offrant des corridors de sécurité, ont de leur côté intensifié leurs frappes contre les forces armées de Bachar Al-Assad.

Washington, craignant de perdre du terrain au profit de Moscou et d’Ankara, a décidé de soutenir une «armée [syrienne] libre» qui ne serait ni sous influence turque ni celle des russes.

Interceptant le message au vol, plusieurs factions armées syriennes ont pris la décision de se réunir sous un même étendard. «Harakat Nour al-Din al-Zinki» et «Ahrar al-Sham» ont ainsi fusionné leurs mouvements sous le nom de «Front de libération de la Syrie». L'objectif annoncé de cette réunification est d'unir les Forces révolutionnaires de la Syrie.

Dans une dépêche câblée par Medad Press, une plateforme média proche du mouvement al-Zinki, on apprend que le nouveau «Front de Libération de la Syrie» a désigné le leader d'Ahrar al-Sham, Hassan Sawfan, comme nouveau patron du Front. Il sera assisté par Hussam al-Atrash jusqu'à présent leader du mouvement al-Zinki. Par ailleurs, le colonel Khalid Al-Ayman a été nommé commandant en chef militaire du Front.

Les deux mouvements expliquent que cette initiative vise à serrer les rangs de la résistance contre le régime de Bachar al-Assad et éviter la dispersion des efforts de lutte et de combat.

En revanche, le Font de Libération de la Syrie se dit prêt à concourir avec les autres Forces vives de la nation syrienne pour libérer la Syrie du joug de la dictature et construire ensemble les institutions souveraines du pays ainsi qu'une armée nationale forte et moderne.

Soutenu par les États-Unis, l'Arabie saoudite, le Qatar et la Syrie, le groupe rebelle «Harakat Nour al-Din al-Zenki» est un acteur central de la guerre civile syrienne fondé en novembre 2011.

De leur côté, les «Ahrar al-Sham», proches d'Al-Qaida, et soutenus également par les saoudiens et les américains, ont pour objectif de fonder un État syrien relevant de la Sharia'. Rivaux avec l'autre mouvement rebelle «Tahrir al-Sham» dont relève le célèbre al-Nusra, «Ahrar al-Sham» se battent sur plusieurs fronts : anti-Bachar, anti-Iran, anti-Russie mais la ligne de démarcation entre eux et DAECH reste difficile à déterminer.

Et c’est justement cette confusion qui a été exploitée par Washington pour se rapprocher de «Harakat Nour al-Din al-Zinki» et «Ahrar al-Sham» et de les encourager à fonder un Front de Libération de la Syrie qui serait le porte-voix de tout le peuple syrien. Comprenant parfaitement la tactique et la volonté américaines de contrecarrer l’influence russe, le pouvoir à Moscou a vu rouge : il a alors répliqué de la manière la plus violente donnant lieu à un des massacres les plus terribles de l’histoire des guerres contemporaines.

Le drame que vivent les populations de la Ghouta orientale, dans la banlieue de Damas, n’est que la résultante de la réaction féroce des russes qui voyaient en la naissance du Front de Libération de la Syrie une menace directe et frontale à ses intérêts militaires et politiques. Intérêts politiques parce que c’est la Russie qui chapeaute les pourparlers de paix à Astana ne laissant aucune marge de manœuvre à Washington dans ce dossier. Exploitant les images tragiques d’enfants déchiquetés par la force de frappe russe et l’élan mondial de condamnation de ces crimes contre l’humanité dont sont victimes des populations innocentes, les Etats-Unis ont officiellement demandé à la Russie de stopper net cette barbarie, tout en informant Moscou qu’ils ne reconnaîtront plus les pourparlers de Astana, invitant par-là le Kremlin à revenir à la table des négociations à Genève sous les auspices des Nations unies.

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