Donald Trump a été mis en accusation mercredi soir lors d’un vote au Congrès synonyme de procès en destitution pour le président américain , qui a immédiatement dénoncé la « haine » de ses adversaires politiques.
La Chambre des représentants, dominée par les démocrates, s’est prononcée en faveur de la destitution du Président américain de 73 ans pour « abus de pouvoir », par 230 voix contre 197.
Il appartient désormais au Sénat de juger Donald Trump, sans doute en janvier. Les républicains, qui contrôlent la chambre haute, ont la ferme intention d’acquitter leur président.
« Le président a confiance dans le Sénat pour rétablir l’ordre », a réagi dans la foulée la Maison-Blanche. « Il est prêt pour les prochaines étapes et a confiance dans le fait qu’il sera totalement disculpé ».
Le vote de mercredi soir à la Chambre, intervenu à moins d’un an du scrutin présidentiel, est en tout point historique.
Dans un spectaculaire télescopage télévisuel, la décision est tombée au moment où Donald Trump était à la tribune d’un meeting de campagne à Battle Creek, dans le Michigan, à environ 1000 km de Washington.
Trump, 3ème président de l’histoire des États-Unis à être mis en accusation par la Chambre des Représentants
Seuls deux autres présidents — Andrew Johnson en 1868 et Bill Clinton en 1998 — ont vécu une mise en accusation. Le républicain Richard Nixon, empêtré dans le scandale du Watergate, avait préféré démissionner en 1974 avant de subir telle avanie.
Cependant, le président pourrait être au bout de ses tourmentes dans bientôt un mois. Il se dirigerait à l’instar de l’ex-président Clinton, vers un acquittement au Sénat et ne sera pas démis de ses fonctions. Mais cela scelle sa place dans l’histoire.
D'un échange téléphonique au procès en destitution
Un échange téléphonique entre Donald Trump et son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky s'est transformé en scandale d'Etat qui débouche sur une mise en accusation du président américain et un prochain procès en destitution: retour sur les grandes dates de l'affaire ukrainienne.
Début 2019: premières accusations
L'avocat personnel de Donald Trump, Rudy Giuliani, évoque sans les étayer des accusations de corruption contre le groupe gazier ukrainien Burisma et l'un de ses membres, Hunter Biden, fils de l'ancien vice-président démocrate Joe Biden.
Au printemps, Trump charge Giuliani de convaincre le nouveau président ukrainien Volodymyr Zelensky d'enquêter sur Burisma, alors que Joe Biden se lance dans la course à la Maison Blanche.
10 juillet: première demande officielle
L'ambassadeur américain auprès de l'Union européenne Gordon Sondland annonce à des responsables ukrainiens que Donald Trump recevra M. Zelensky à la Maison Blanche si Kiev annonce publiquement une enquête sur les Biden.
Deux participants à la discussion signalent à leur hiérarchie cette proposition «inappropriée».
25 juillet: appel Trump/Zelensky
Quelques jours après avoir gelé 400 millions de dollars d'aide militaire à l'Ukraine, Donald Trump s'entretient par téléphone avec Zelensky. Il demande comme une "faveur" que Kiev enquête sur les Biden et Burisma.
Un membre du Conseil de sécurité nationale, qui assiste à la conversation, signale un échange «inapproprié» aux services juridiques de l'instance.
12 août: le lanceur d'alerte
Un laceur d'alerte, membre des services de renseignement, signale à sa hiérarchie l'appel entre les deux présidents. Il accuse Donald Trump d'avoir «sollicité l'ingérence» de l'Ukraine dans la campagne pour sa réélection en 2020.
Le signalement est bloqué par le directeur du renseignement américain, Joseph Maguire, en accord avec la Maison Blanche et le ministère de la Justice. Mais l'inspecteur général de services de renseignement, Michael Atkinson, décide d'informer le Congrès de l'existence du lanceur d'alerte.
28 août: le gel de l'aide rendu public
La presse révèle le gel de l'aide militaire à l'Ukraine et des diplomates américains s'inquiètent des pressions exercées sur Kiev.
L'administration Trump autorise le versement de cette aide le 11 septembre.
Pour les républicains, il n'y a pas de «donnant-donnant» puisque les Ukrainiens ignoraient le gel de l'aide. Mais selon une responsable du ministère américain de la Défense, l'ambassade ukrainienne à Washington s'était inquiétée d'une suspension de l'aide dès le 25 juillet.
24 septembre: enquête à la Chambre
Après la révélation de l'existence du lanceur d'alerte, la présidente démocrate de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, annonce l'ouverture d'une enquête en vue d'une procédure de destitution du président. Adam Schiff, patron de la commission du Renseignement à la Chambre, est chargé de diriger l'enquête.
Donald Trump dénonce une «chasse aux sorcières» et la Maison Blanche publie le lendemain le contenu de la conversation Trump/Zelensky. A New York, les deux chefs d'Etat assurent qu'il n'y a eu aucune «pression».
13-21 novembre: auditions publiques
La commission d'enquête débute les auditions publiques, après avoir entendu en octobre une dizaine de témoins à huis clos.
Gordon Sondland, affirmant avoir suivi les "ordres" de Donald Trump, confirme l'existence d'un "donnant-donnant": une invitation de Zelensky à la Maison Blanche contre l'annonce d'ouverture d'enquêtes à Kiev.
Mais le président ne lui ayant «jamais dit directement que l'aide» militaire faisait partie du marché et il admet avoir fait sa "propre déduction" en liant les deux affaires.
3 décembre: preuves «accablantes»
Le rapport d'enquête affirme que la commission a rassemblé des "preuves accablantes" d'une «conduite inappropriée» de Donald Trump: celui-ci aurait «conditionné une invitation à la Maison Blanche et une aide militaire à l'Ukraine à l'annonce d'enquêtes favorables à sa campagne» et il aurait «entravé» le travail du Congrès en interdisant à des membres de l'administration de collaborer.
10 décembre: deux chefs d'accusation
La commission judiciaire de la Chambre retient deux motifs pour la mise en accusation ("impeachment") du président: abus de pouvoir et entrave à la bonne marche du Congrès.
18 décembre: Trump mis en accusation
Donald Trump est mis en accusation par la Chambre des représentants, contrôlée par les démocrates. Il fait face à un procès en destitution devant le Sénat, à majorité républicaine, qui devrait s'ouvrir en janvier.
Avec AFP