Le Premier ministre Benjamin Netanyahu et son ex-rival Benny Gantz n'ont pas réussi à s'entendre sur un gouvernement «d'union et d'urgence», en pleine crise du coronavirus, à l'issue jeudi de leur ultimatum pour tenter de mettre un terme à la plus longue crise politique de l'histoire d'Israël.
Après 16 mois de gouvernement de transition, trois élections législatives et des rebondissements les plus improbables et parfois les plus désespérants pour certains Israéliens, les équipes de Netanyahu, 70 ans, et Gantz, 60 ans, se sont retrouvées mercredi soir après la fin des festivités de la Pâque juive, Pessah, ont-elles annoncé dans un communiqué conjoint.
Avec l'assentiment d'une majorité de parlementaires après les législatives du 2 mars, le président Reuven Rivlin avait accordé à Benny Gantz le mandat de former le prochain gouvernement. Et ce dernier avait causé la surprise en disant accepter de former un gouvernement avec Benjamin Netanyahu, ce qu'il refusait jusque là accusant notamment le Premier ministre de corruption.
Au cours des deux dernières semaines, les deux ont multiplié les pourparlers au point où, après l'expiration du mandat de Benny Gantz, lundi soir, le président avait décidé in extremis de remettre un jeton dans la machine à négociations accordant ainsi aux deux leaders jusqu'à minuit (21H00 GMT mercredi) pour trouver un accord de gouvernement.
Mais passé minuit, le mandat de Benny Gantz a bien expiré, a confirmé à l'AFP une source à la présidence. En théorie, le président israélien pourrait redemander aux parlementaires de lui recommander un autre élu pour tenter de former un gouvernement et sortir Israël d'une crise politique sans précédent et ce en pleine crise du nouveau coronavirus qui y a contaminé plus de 12.000 personnes, dont 130 sont décédées.
Désaccord sur le portefeuille de la Défense
Les dernières semaines ont montré des tensions entre les camps Netanyahu et Gantz sur le choix notamment du futur ministre de la Justice, qui sera aux commandes pendant le procès de Netanyahu, poursuivi pour corruption, malversation et abus de confiance dans trois affaires.
Le procès de Bibi, Premier ministre le plus pérenne de l'histoire d'Israël avec 14 ans au pouvoir, devait s'ouvrir à la mi-mars. Mais les mesures de confinement pour tenter de juguler la crise du Covid-19 ont forcé, comme dans de nombreux pays, la fermeture des tribunaux et donc le report du procès.
Des désaccords semblent aussi persister sur la nomination d'un ministre de la Défense -- M. Gantz et son acolyte Gaby Ashkenazi étant d'ex-chefs d'état-major --, ainsi que sur le projet d'annexion de la Vallée du Jourdain en Cisjordanie occupée.
Netanyahu pourrait jouer l'attentisme afin de provoquer une quatrième élection et rester aux commandes du pouvoir
Après avoir été initialement désigné pour former le gouvernement, Benny Gantz, qui il y a encore quelque temps refusait de participer à un gouvernement dirigé par M. Netanyahu en raison de son inculpation pour corruption, a mis de l'eau dans son vin en renonçant, à court terme du moins, à son projet de devenir Premier ministre et en consentant à participer à un gouvernement dirigé par Benjamin Netanyahu.
«Netanyahu, nous sommes arrivés à l'heure de vérité», a déclaré cette semaine Benny Gantz, dont le projet de former un gouvernement avec Benjamin Netanyahu a contribué à l'implosion de sa propre coalition centriste Kahol Lavan (Bleu-Blanc, les couleurs du drapeau israélien).
Des ténors de son parti ont refusé de le joindre dans sa politique de la main tendue à Benjamin Netanyahu, qui a désormais face à lui une opposition affaiblie.
Après ces rounds de discussions sans résultat probant, nombre d'éditorialistes s'interrogent sur les intentions du Premier ministre sortant: Benjamin Netanyahu veut-il vraiment partager le pouvoir avec Benny Gantz?
Surfant de surcroît sur des sondages d'opinion très favorables qui plébiscitent sa gestion de la pandémie -- Israël ayant été nommé le pays le plus sûr, devant l'Allemagne, selon une étude du consortium DKV --, le Premier ministre pourrait jouer l'attentisme afin de provoquer une quatrième élection et rester d'ici là aux commandes du pouvoir.