Arabie Saoudite : Une campagne digitale nationale pour soutenir le roi Salmane et MBS

Les mises en garde du président américain contre le régime saoudien le menaçant de sanctions sans précédent au cas où il venait à être prouvé son implication dans la disparition du journaliste Jamal Khashoggi, ont sonné le glas dans la maison des Al-Saoud qui vit avec cette affaire sa plus grave crise depuis les événements du 11-septembre 2001. Riyadh, qui n’avait pas l’habitude d’un tel ton à son égard, et sans avoir eu le temps de rétorquer officiellement à Washington, s’est fait remonter dimanche les bretelles par les européens qui ont demandé l’ouverture d’une enquête officielle pour mettre toute la lumière sur cette affaire qui fragilise d’heure en heure l’Arabie saoudite et notamment l’homme fort du régime, le prince héritier Mohamed Ben Salmane. Pour sauver le soldat MBS, les communicants du régime, incapables de convaincre leurs interlocuteurs par les voies diplomatiques classiques, ont fait appel au digital pour sauver ce qui peut encore l’être.

Le premier à monter au créneau, après deux semaines de silence absolu, c’est le roi Salmane en personne. Il a décroché son téléphone pour s’entretenir avec le président Erdogan pour l’assurer de la disposition de l’Arabie saoudite à mener une enquête conjointe avec la Turquie en vue de lever le voile sur les circonstances de disparition du journaliste saoudien Jamal Khashoggi. Cette sortie du roi Salmane, largement reprise par les médias saoudiens et émiratis, était une sorte de signal de départ d’une vaste campagne digitale dont le but est de soutenir un MBS fragilisé et totalement absent des radars depuis le déclenchement de cette affaire, et un soutien au roi Salmane le présentant comme le garant de la stabilité de l’Arabie saoudite.

Ce qui a accéléré le déclenchement de cette vaste campagne digitale en appui à MBS et à son père, c’est le communiqué conjoint publié dimanche par trois pays européens majeurs, à savoir, l’Allemagne, le Royaume-Uni et la France qui se sont dit partager les graves préoccupations exprimées par plusieurs parties, notamment par la Haute Représentante de l’Union européenne Federica Mogherini et le Secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, et prennent cette affaire très au sérieux. Les trois pays ont appelé à l’ouverture d’une enquête crédible pour établir la vérité au sujet de ce qui s’est passé et, le cas échéant, pour identifier les responsables de la disparition de Jamal Khashoggi et leur demander des comptes.

C’est ainsi que Riyadh a compris que cette l’affaire Kashoggi prenait une tournure inquiétante pour le régime saoudien. Non seulement les Al-Saoud font face à une pression sans précédent des médias internationaux, mais désormais des plus grandes capitales mondiales, Washington, Londres, Berlin et Paris.

Si certains communicants saoudiens maladroits , croyant bien dire et faire, ont rétorqué à Washington que Riyadh était disposé à s’aligner sur l’Iran et à s’armer de chez Moscou, surtout venant d’un Turki Al-Dakhil, les pouvoirs publics saoudiens ont vite repris la main de la communication officielle : 1) Le roi Salmane appelle Erdogan et tente d’apaiser les tensions qui ont atteint un niveau jamais égalé; 2) Une campagne digitale a démarré en soirée, juste après l’entretien téléphonique, mobilisant des leaders d’opinion, des entreprises privées et publiques, et même certains membres de la famille régnante.

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